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DES QUATRE CHAPITRES PRÉCÉDENTS.

Il n’en subsiste pas moins le fait incontestable que les variétés domestiques d’animaux et de plantes qui, quoique différant beaucoup entre elles par leur conformation, descendent cependant d’une même espèce primitive, telles que les races gallines, les pigeons et beaucoup de végétaux, sont très-fécondes lorsqu’on les croise ; circonstance qui semble élever une barrière infranchissable entre les variétés domestiques et les espèces naturelles. Je montrerai cependant que la distinction n’est ni aussi grande ni aussi importante qu’elle peut à première vue le paraître.

Différences dans la fécondité des variétés et des espèces croisées. — Sans vouloir traiter ici à fond la question de l’hybridité, dont j’ai donné un extrait assez complet dans mon Origine des Espèces, je me bornerai à rappeler ici les conclusions générales auxquelles on peut se fier, et qui se rattachent au point qui nous occupe.

Premièrement. Les lois qui président à la production des hybrides sont identiques, ou à peu près, dans les règnes végétal et animal.

Secondement. La stérilité des espèces distinctes, lorsqu’on les unit pour la première fois, ainsi que celle de leurs produits hybrides, offre presque tous les passages gradués depuis zéro, lorsque l’ovule n’est jamais fécondé et qu’il ne se forme jamais de capsule de graines, jusqu’à la fertilité complète. Nous ne pouvons échapper à la conclusion qu’il y a des espèces complétement fécondes lorsqu’on les croise, qu’en décidant de désigner sous le nom de variétés toutes les formes qui, croisées, donnent des produits fertiles. Un haut degré de fécondité est cependant rare ; néanmoins on voit des plantes qui, placées dans des conditions artificielles, se modifient d’une manière si particulière, quelles sont plus fertiles lorsqu’on les croise avec une espèce distincte que fécondées par leur propre pollen.

La réussite d’un premier croisement entre deux espèces et la fertilité de leurs hybrides dépendent beaucoup de conditions extérieures favorables. La stérilité inhérente aux hybrides de même provenance, et levés de la graine d’une même capsule, peut beaucoup différer quant au degré.

Troisièmement. Le degré de stérilité que peut présenter un