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STÉRILITÉ.

l’hybridisation, il y a, d’après Gärtner[1], une forte tendance chez les fleurs à devenir doubles, tendance qui est héréditaire. Il est de plus notoire que, chez les hybrides, les organes mâles deviennent stériles avant les organes femelles, et que dans les fleurs doubles les étamines deviennent foliacées les premières. C’est ce que montrent les fleurs mâles des plantes dioïques, qui, d’après Gallesio[2], se doublent aussi les premières. Gärtner[3] appuie aussi sur ce que les fleurs des hybrides complétement stériles, qui ne donnent pas de graines, produisent cependant des capsules ou fruits parfaits, — fait observé fréquemment par Naudin chez les Cucurbitacées, — de sorte qu’on peut comprendre la production de fruits chez des plantes rendues stériles par toute autre cause distincte. Kölreuter a aussi exprimé son étonnement de la grosseur des tubercules chez certains hybrides, et tous les expérimentateurs[4] ont signalé la tendance prononcée qu’ils présentent à se multiplier par racines, par coulants ou drageons. Voyant que les plantes hybrides, plus ou moins stériles par leur nature, tendent ainsi à produire des fleurs doubles ; qu’elles ont leur fruit, c’est-à-dire la partie qui enveloppe la graine, bien développé, même lorsqu’il ne renferme pas de graines ; qu’elles produisent souvent des racines énormes ; qu’elles ont une tendance presque invariable à se multiplier par drageons et autres modes semblables ; et sachant, d’après les faits nombreux donnés au commencement de ce chapitre, que presque tous les êtres organisés tendent, lorsqu’on les expose à des conditions artificielles, à devenir plus ou moins stériles, — l’idée la plus probable est celle que, chez les plantes cultivées, la stérilité est la cause déterminante, et que les fleurs doubles, les fruits sans graines, le développement exclusif des organes de la végétation, etc., en sont les résultats indirects, — ces résultats ayant, dans la plupart des cas, été considérablement augmentés par la sélection continue de l’homme.



  1. O. C., p. 565. — Kölreuter, Dritte Forts, p. 73, 87, 119, montre que lorsqu’on croise deux espèces, l’une simple et l’autre double, les hybrides sont sujets à être extrêmement doubles.
  2. Teoria, etc., 1816, p. 73.
  3. Bastarderzeugung, p. 573.
  4. Ibid., p. 527.