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DES CHANGEMENTS DE CONDITIONS

chevaux, bêtes bovines, porcs, chiens et pigeons[1]. Dans ces cas, des femelles qui, soit antérieurement, soit ensuite, s’étaient montrées fécondes, ne produisirent rien par certains mâles, avec lesquels on désirait tout particulièrement les apparier. Il se pourrait qu’il soit survenu quelque changement de constitution dans la femelle avant qu’on la livre au second mâle ; mais il est des cas où cette explication n’est pas soutenable, car une femelle, connue pour ne pas être stérile, a pu sans résultat être livrée sept ou huit fois à un même mâle également reconnu fertile. Pour les juments de gros trait, qui quelquefois ne produisent rien par des étalons de pur sang, mais ont ensuite porté après avoir été livrées à des étalons de leur race, M. Spooner croit qu’on doit attribuer l’insuccès à la puissance sexuelle moins forte du cheval de sang. Mais je tiens de M. Waring, le plus grand éleveur actuel de chevaux de course, qu’il arrive souvent qu’une jument, livrée pendant une ou deux saisons à un étalon reconnu fécond, et demeurée stérile, donne ensuite un produit par un autre cheval. Ces faits montrent, comme beaucoup d’autres précédemment signalés, de quelles faibles différences constitutionnelles peut souvent dépendre la fécondité d’un animal.


De la stérilité des plantes occasionnée pur les changements dans les conditions extérieures et par d’autres causes. — Dans le règne végétal il se présente fréquemment des cas de stérilité analogues à ceux que nous venons de voir dans le règne animal. Le sujet se complique de plusieurs circonstances que nous allons examiner et qui sont : la contabescence des anthères ; nom que Gartner a donné à une affection particulière ; — les monstruosités ; — la duplication de la fleur ; — l’agrandissement du fruit, — et la propagation par bourgeons excessive ou longtemps continuée.


On sait que, dans nos jardins et nos serres, beaucoup de plantes ne produisent que rarement ou quelquefois jamais de graines, bien que se trouvant d’ailleurs en fort bon état. Je n’ai pas ici en vue les plantes qui, par excès d’humidité, de chaleur ou de fumier, poussent en feuilles et ne produisent pas l’individu reproducteur ou la fleur, cas qui est tout différent ; ni les fruits qui ne mûrissent pas faute de chaleur, ou qui pourrissent par trop d’humidité. Mais bien des plantes exotiques, dont le pollen et les ovules paraissent sains, ne donnent aucune graine. Dans bien des cas, comme je m’en suis assuré par mes observations, la stérilité est simplement due à l’absence des insectes nécessaires pour porter le pollen au stigmate ; mais, en outre, il y a des plantes chez lesquelles le système reproducteur a été sérieusement affecté par les changements dans les conditions extérieures auxquelles elles ont été exposées.

  1. Dr Chapuis, Le Pigeon voyageur belge, 1865, p. 66.