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COMME CAUSANT LA STÉRILITÉ.

connaissait aucun cas d’accouplement et de reproduction des mouettes, bien qu’on en eût depuis longtemps conservé, tant au Jardin Zoologique qu’à celui de Surrey ; mais, depuis cette époque le Larus argentatus a souvent reproduit, soit au Jardin Zoologique, soit à Knowsley.

Il y a lieu de croire que la captivité agit sur les insectes, comme sur les animaux supérieurs. On sait que les Sphingidés ne reproduisent que rarement dans ces circonstances. Un entomologiste[1] de Paris, a conservé vingt-cinq individus de Saturnia pyri, sans pouvoir en obtenir un seul œuf fertile. Un certain nombre de femelles d’Orthosia munda et de Mamestra suasa, élevées en captivité, n’attirèrent pas les mâles[2]. M. Newport a conservé près de cent individus de deux espèces de Vanessa, sans qu’aucun s’appariât ; ceci provient peut-être de ce que ces insectes ont l’habitude de s’accoupler pendant le vol[3]. Dans l’Inde, M. Atkinson n’a jamais réussi à faire reproduire le Bombyx Tarroo on captivité[4]. Il paraît qu’un certain nombre de phalènes, surtout dans les Sphingidés, sont complétement stériles lorsqu’elles éclosent en automne, hors de leur saison ordinaire ; cependant il règne encore quelque obscurité sur ce point[5].


Outre le fait que beaucoup d’animaux ne s’accouplent pas en captivité, ou s’accouplent sans résultat, il en est d’autres qui témoignent d’une perturbation dans leurs fonctions sexuelles. On a consigné beaucoup de cas d’oiseaux mâles ayant perdu en captivité leur plumage caractéristique. Ainsi la linotte commune (Linota cannabina), n’acquiert pas en cage la belle nuance cramoisie sur sa poitrine, et un bruant (Emberiza passerina), y perd la coloration noire de sa tête. Un Pyrrhula et un Oriolus ont revêtu le plumage tranquille de leur femelle, et le Falco albidus est revenu au plumage de sa jeunesse[6]. M. Thompson, le directeur de la ménagerie de Knowsley m’a signalé des faits analogues. Les bois d’un cerf mâle (Cervus Canadensis) qui s’étaient mal développés pendant le voyage d’Amérique, furent ultérieurement à Paris remplacés par des bois complets.

Lorsque, en captivité, la conception a lieu, les jeunes animaux naissent souvent morts, ou meurent bientôt, ou sont mal conformés. C’est ce qui arrive souvent au Jardin Zoologique,

  1. Loudon’s, Mag. of Nat. Hist., vol v, 1832, p. 153.
  2. Zoologist, vol. vvi, 1847–48, p. 1660.
  3. Transact. Entom. Soc., vol. iv, 1845, p. 60.
  4. Transact. Linn. Soc., vol. VII, p. 40.
  5. M. Newman, Zoologist, 1857, p. 5764. — Dr Wallace, Proc. Entom. Soc., Juin 4, 1860, p. 119.
  6. Yarrell, British Birds, vol. I, p. 506. — Bechstein, Stubenvögel, p. 185. — Philos. Transact., 1772, p. 271. — Bronn, Geschichte der Natur, vol. II, p. 96, a recueilli un certain nombre de cas. Pour le cerf, Penny Cyclopedia, vol. VIII, p. 350.