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COMME CAUSANT LA STÉRILITÉ.

roquets ; dans le Rapport des neuf ans précité, treize espèces sont mentionnées comme ayant reproduit, et deux seulement s’étaient accouplées sans résultat ; les rapports subséquents renferment chaque année des cas de reproduction chez plusieurs espèces. Les deux magnifiques espèces, Goura coronata et Victoriæ ont produit des hybrides ; j’apprends toutefois de M. Crawfurd qu’une douzaine d’oiseaux de la première de ces espèces conservés dans un parc à Penang, sous un climat parfaitement convenable, n’ont pas reproduit une seule fois. La Columba migratoria, qui, dans l’Amérique du Nord, son pays natal, pond toujours deux œufs, n’en a jamais pondu plus d’un dans la ménagerie de lord Derby. Le même fait a été observé chez la C. leucocephala[1].

Les Gallinacés appartenant à plusieurs genres manifestent également une grande aptitude à reproduire en captivité, et surtout les faisans ; l’espèce anglaise ne pond cependant dans cet état que rarement plus de dix œufs, tandis qu’à l’état sauvage la ponte est ordinairement de dix-huit à vingt[2]. Mais pour ces oiseaux, comme pour ceux de tous les autres ordres, on rencontre des exceptions frappantes et inexplicables, relativement à la fécondité de certains genres et espèces tenus en captivité. Ainsi, malgré les nombreuses tentatives faites sur la perdrix commune, elle n’a que rarement pondu, même dans de grandes volières, et jamais la femelle n’a voulu couver ses œufs[3]. Les Cracidés américains qui s’apprivoisent avec une facilité remarquable, sont de très-mauvais reproducteurs[4] dans leur pays ; on a cependant autrefois, en Hollande, réussi avec des soins à les faire reproduire assez bien[5]. Les Indiens les apprivoisent et les gardent dans leur pays natal, mais ils ne se reproduisent jamais[6]. On pouvait s’attendre à ce que, vu ses habitudes, et surtout parce qu’il languit promptement et périt, le Tetrao scoticus (grouse) ne dût pas se propager en captivité[7] ; on a cependant signalé plusieurs cas de reproduction chez cet oiseau ; le Tetrao urogallus a produit au Jardin Zoologique ; il reproduit aussi facilement en captivité en Norwége ; on en a élevé cinq générations consécutives en Russie ; le T. tetrix a reproduit en Norwége ; le T. Scoticus en Irlande ; le T. umbellus chez lord Derby ; et le T. cupido dans l’Amérique du Nord.

Il est difficile de concevoir un plus grand changement dans les habitudes et les conditions que celui auquel sont exposés les membres de la famille des autruches, qui, après avoir erré en liberté dans les plaines et

  1. Audubon, American Ornithology, vol. v, p. 552, 557.
  2. Mowbray, On Poultry, 7e édit., p. 133.
  3. Temminck, Hist. nat. gén. des Pigeons, etc., 1813, t. III, p. 288, 382. — Ann. and Mag. of Nat. History, vol. XII, 1843, p. 453. D’autres espèces de perdrix se sont occasionnellement reproduites ; ainsi la P. rubra, dans une grande cour en France (Journal de Physique, t. xxv, p. 294) et au Jardin Zoologique en 1856.
  4. Rév. E. S. Dixon, The Dovecote, 1851, p. 243–252.
  5. Temminck, O. C., t II, p. 456, 458 ; t. III, p. 2, 13, 47.
  6. Bates, The Naturalist on the Amazon, vol. I, p. 193 ; vol. II, p. 112.
  7. Temminck, O. C., t. III, p. 125. — Pour le Tetrao Urogallus, L. Lloyd. Fieldsports of North of Europe, vol. I, p. 287, 314 ; et Bull. Soc. d’acc., t. VII, 1860, p.600. — Pour T. scoticus, Thompson. Nat. Hist. of Ireland, vol. II, 1850, p. 49. — Pour T. cupido, Boston Journ. of Nat. Hist., vol. III, p. 199.