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COMME CAUSANT LA STÉRILITÉ.

OISEAUX.

L’action des changements de conditions sur la fertilité est encore plus apparente chez les oiseaux, parce qu’on les élève en grande quantité, et qu’ils se reproduisent beaucoup plus rapidement. Nous avons vu que les animaux carnassiers étaient plus fertiles en captivité que la plupart des autres mammifères ; c’est le contraire chez les oiseaux carnivores. On a employé[1] en Europe pour les usages de la fauconnerie, dix-huit espèces d’oiseaux de proie et plusieurs autres en Perse et dans l’Inde[2] ; elles ont été conservées dans leur pays natal dans les meilleures conditions, ont servi pour la chasse pendant six, huit ou neuf ans[3], et cependant on ne connaît pas chez elles un seul cas de reproduction. Il n’est pas douteux que s’il eût été possible de les propager on ne l’eût fait, car on importait ces oiseaux d’Islande, de Norwége et de Suède, où on les prenait à grands frais pendant qu’ils étaient jeunes. On n’a aucun cas d’accouplement au Jardin des plantes[4]. Aucun faucon, vautour ou hibou n’a jamais produit d’œufs fertiles au Jardin Zoologique ni à celui de Surrey ; dans le premier endroit et dans une seule circonstance, cela est arrivé à un condor et un milan (Milvus niger). On y a cependant observé l’accouplement chez les Aquila fusca, Haliætus leucocephalus, Falco tinnunculus, F. subbuteo et Buteo vulgaris. M. Morris[5] signale comme un fait unique un cas de reproduction chez un Falco tinnunculus gardé en volière. Le Hibou dont on a constaté l’accouplement au Jardin Zoologique de Londres était un grand-duc (Bubo maximus), qui paraît d’ailleurs avoir des dispositions à reproduire en captivité, car une paire conservée au château d’Arundel, dans des conditions plus voisines de l’état de nature que ne le sont d’ordinaire les animaux privés de leur liberté[6], éleva effectivement ses petits. M. Gurney cite un autre cas analogue relatif au même oiseau, et un second d’une autre espèce de hibou, Strix passerina, comme ayant reproduit en captivité[7].

On a apprivoisé et conservé pendant longtemps dans leur pays natal un grand nombre d’oiseaux granivores plus petits, et cependant la plus haute autorité[8], en matière d’oiseaux de volière, constate que leur propagation est extrêmement difficile. Le canari fournit la preuve qu’il n’y a aucune difficulté inhérente à ce que les petits oiseaux puissent se reproduire en captivité, et d’après Audubon[9], le Fringilla ciris de l’Amérique du Nord se propage aussi bien que le canari. Pour beaucoup de ces petits oiseaux qu’on a conservés en captivité, le fait le plus remarquable est que,

  1. Encyc. of Rural Sports, p. 691.
  2. D’après Sir A. Burnes (Caboul, etc., p. 51), on utilise dans le Scinde, pour la fauconnerie, huit espèces.
  3. Loudon’s, Mag. of Nat. Hist., vol. VI, 1833, p. 110.
  4. F. Cuvier, Ann. du Muséum, t. IX, p. 128.
  5. The Zoologist, vol. VIIVIII, 1849–50, p. 2648.
  6. Knox, Ornithological Rambles in Sussex, p. 91.
  7. The Zoologist, vol. VIIVIII, 1849–50, p. 2566. — Vol. IXx, 1851–52, p. 3207.
  8. Bechstein, Naturg. der Stubenvögel, 1840, p. 20.
  9. Ornithological Biography, vol. v, p. 517.