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CONCLUSION.

ment, en ce qui concerne leurs qualités caractéristiques, il ne paraît pas y avoir d’exception à la règle que les croisements sont avantageux, même lorsqu’ils n’ont pas été précédés d’une reproduction consanguine. La règle s’applique à tous les animaux, même au bétail et aux moutons, qui peuvent le mieux et le plus longtemps résister à une reproduction consanguine entre les parents les plus rapprochés. Elle s’applique aussi aux individus de la même sous-variété, mais appartenant à des lignées différentes, aux variétés ou races, aux sous-espèces, et aux espèces distinctes.

Dans ce dernier cas, il est vrai que, pendant qu’à peu d’exceptions près on gagne de la taille, de la précocité, de la vigueur et de la résistance, on perd, à un degré plus ou moins marqué, en fertilité ; mais le gain ne peut être exclusivement attribué au principe de compensation, car il n’y a pas de rapport exact entre le degré de stérilité et l’accroissement de taille et de vigueur du produit hybride. On a même clairement démontré que les métis qui sont entièrement féconds, peuvent présenter ces mêmes avantages au même degré que ceux qui sont stériles.

La détérioration causée par la reproduction consanguine trop prolongée étant très-graduelle, les effets nuisibles qui peuvent en résulter sont moins appréciables que les effets avantageux qui suivent le croisement. Néanmoins, l’opinion générale de tous ceux qui ont le plus d’expérience sur le sujet est qu’il en résulte inévitablement, plus tôt ou plus tard, suivant les animaux, et surtout chez ceux qui se propagent avec rapidité, des inconvénients. Une idée fausse peut bien se répandre comme une superstition, mais il est cependant difficile d’admettre que tant d’observateurs habiles et sagaces aient pu se tromper ainsi aux dépens de leur temps et de leur peine. On peut quelquefois apparier un animal mâle avec sa fille, sa petite-fille, et ainsi de suite pendant sept générations, sans aucun résultat manifestement mauvais ; mais on n’a jamais essayé de pousser aussi loin les unions entre frères et sœurs, qu’on regarde comme la forme la plus rapprochée de la consanguinité. On a tout lieu de croire qu’en conservant les membres d’une même famille, par groupes distincts, maintenus dans des conditions extérieures un peu différentes, et