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INCONVÉNIENTS DE LA REPRODUCTION, ETC.

M. W. Adam[1], et déjà par Hofacker en 1828. M. Tylor est disposé à croire que la prohibition presque universelle des mariages consanguins, doit son origine à l’observation des effets nuisibles qui en résultent ; et il explique, d’une manière ingénieuse, quelques anomalies apparentes dans la prohibition, qui ne s’applique pas également aux mêmes degrés de parenté du côté masculin et féminin. Il admet toutefois que d’autres causes, telles que l’extension d’alliances d’amitié, ont pu être prises en considération. D’autre part, M. W. Adam conclut que les mariages entre parents rapprochés, sont vus avec répugnance et prohibés, par suite de la confusion qui en résulterait dans la transmission de la propriété, et d’autres raisons encore plus abstraites ; mais, je ne puis admettre cette idée, devant le fait que les sauvages de l’Australie et de l’Amérique du Sud[2], qui n’ont pas de propriétés à transmettre, ni de sens moral bien délicat, ont horreur de l’inceste.

Comme pouvant jeter quelque jour sur ce sujet au point de vue de l’homme, et si une telle vérification était possible, il serait intéressant de savoir comment se comportent sous ce rapport les singes anthropomorphes supérieurs ; — si les jeunes mâles et femelles se séparent de leurs parents ; ou si les vieux mâles, jaloux de leurs fils, les expulsent ; ou enfin, s’il existe quelque instinct héréditaire, ayant pu se développer ensuite des avantages qui en résultaient pour l’espèce, et qui pousse les jeunes individus d’une même famille à s’apparier de préférence avec ceux de familles différentes, plutôt que de s’unir entre eux. Un grand nombre de faits prouvent que la progéniture produite par des ascendants n’ayant entre eux aucune relation de parenté est plus vigoureuse et plus féconde que celle de parents consanguins ; de là tout sentiment, quelque léger qu’il soit, — qu’il provienne d’une excitation sexuelle déterminée par la nouveauté, ou par toute autre cause, — poussant plutôt aux unions de la première catégorie qu’à celles de la seconde, et s’accroissant par sélection naturelle, a pu devenir instinctif ; et les individus ayant une préférence innée de cette nature, ont dû tendre à augmenter

  1. On Consanguinity in Marriage, Fortnightly Review, 1865, p. 710. — Hofacker, O. C.
  2. Sir G. Gray, Journal of Expeditions into Australia, vol. II, p. 243. — Dobrizhoffer, On the Abipones of South America.