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PAR LA DOMESTICATION.

lapin sauvage porte quatre fois l’an et fait de quatre à huit petits ; le lapin domestique fait de six à sept portées annuelles, chacune de quatre à onze petits. Le furet, quoique tenu en captivité, est plus prolifique que son prototype sauvage supposé. La femelle du sanglier est remarquablement féconde, car elle porte souvent deux fois par an, et peut produire par portée de quatre à huit, et même jusqu’à douze petits ; la truie domestique met bas deux fois l’an régulièrement, et porterait plus souvent si on le lui permettait ; et une truie qui donne moins de huit petits par portée est peu estimée, et on s’empresse de l’engraisser pour le boucher. La quantité de nourriture agit même sur la fécondité d’un même animal ; ainsi les brebis, qui ne produisent sur les montagnes qu’un seul agneau à la fois, donnent souvent des jumeaux lorsqu’on les descend dans des pâturages bas. Cette différence ne paraît pas due à la température froide des régions élevées, car les moutons et autres animaux domestiques, sont très-féconds en Laponie. Une mauvaise nourriture peut retarder l’époque à laquelle les animaux commencent à concevoir, car, dans les îles du nord de l’Écosse, on a reconnu qu’il était désavantageux de faire porter les vaches avant l’âge de quatre ans[1].


Chez les oiseaux, l’augmentation de la fécondité par la domestication est encore plus marquée ; la poule du Gallus bankiva pond de six à dix œufs, chiffre qui serait faible pour une poule domestique. La cane sauvage pond de cinq à dix œufs ; la domestique en pond de quatre-vingts à cent dans une année. L’oie sauvage pond de cinq à huit œufs, la domestique de treize à dix-huit, et pond même une seconde fois ; selon l’observation de M. Dixon, une nourriture abondante, des soins et une température modérée développent une fécondité qui devient héréditaire. Je ne sais si le pigeon de colombier à demi domestiqué est plus fertile que le bizet sauvage ; mais les races domestiques les plus travaillées sont presque deux fois aussi productives que les pigeons de colombier ; ces derniers toutefois, élevés en cage et bien nourris, deviennent aussi fertiles que les pigeons de maison. Seule de tous nos animaux domestiques, la femelle du paon paraît, d’après quelques récits, être plus féconde à l’état sauvage, dans son pays d’ori-

  1. Pour les chats et chiens, Bellingeri, Ann. des Sc. Nat., 2e série, Zoologie, t. XII, p. 155. — Pour le furet, Bechstein, Naturg. Deutschlands, vol. I, 1801, p. 786, 795. — Lapins, id., p. 1123, 1131 ; et Bronn, Gesch. der Natur, vol. II, p. 99. 102. — Truie sauvage, Bechstein, O. C., I, p. 534 ; — Porc domestique, Youatt, On the pig, 1860, p. 62. — Pour la Laponie, Acerbi, Travels to the North Cape, vol. II, p. 222. — Vaches des Highlands, Hogg. On Sheep, p. 263.