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LE LIBRE CROISEMENT DES VARIÉTÉS.

croisent, mais pas avec les plus petites, comme les races de Combat, de Hambourg, etc. Pour les plantes, une différence dans l’époque de floraison suffit pour maintenir les variétés distinctes, comme dans les diverses sortes de maïs et de froment ; le colonel Le Couteur[1] dit que le froment Talavera, par exemple, se maintient pur d’une manière certaine, parce qu’il fleurit beaucoup plus tôt que toutes les autres variétés. Dans diverses parties des îles Falkland, le bétail s’est réparti en troupeaux de couleurs différentes, et ceux qui occupent les points les plus élevés, à ce que m’apprend l’amiral Sulivan, se reproduisent ordinairement trois mois plus tôt que ceux des régions basses, différence qui doit évidemment être un obstacle à tout mélange entre ces troupeaux.

Certaines races domestiques témoignent d’une préférence marquée pour les individus de leur type, fait qui a quelque importance, car c’est un pas vers ce sentiment instinctif qui contribue à maintenir distinctes, dans l’état de nature, les espèces voisines ; et sans lequel, comme nous en avons de nombreuses preuves, il se produirait naturellement bien plus d’hybrides que cela n’est le cas. Nous avons vu, dans le premier chapitre, que le chien alco du Mexique a de l’antipathie pour les chiens d’autres races, et que le chien sans poil du Paraguay se croise moins volontiers avec les chiens européens que ceux-ci ne le font entre eux. On dit qu’en Allemagne, la chienne Spitz reçoit plus volontiers le renard que les chiennes d’autres races, et en Angleterre une femelle du Dingo australien attirait les renards sauvages. Ces différences dans l’instinct sexuel et le pouvoir d’attraction des diverses races, peuvent être dues à ce qu’elles descendent d’espèces différentes. Dans le Paraguay, où les chevaux jouissent d’une grande liberté, on a observé[2] que les chevaux indigènes de même manteau et de même taille, s’unissent entre eux de préférence, et qu’il en est de même des chevaux importés de Entre Rios et de Banda Oriental dans le Paraguay. En Circassie on reconnaît six races de chevaux qui ont reçu des noms distincts, et un grand propriétaire de la localité assure[3] que les chevaux de trois de ces

  1. On the Varieties of Wheat, p. 66.
  2. Rengger, O. C., p. 336.
  3. Lherbette et Quatrefages, Bull. Soc. d’Acclimat., t. VIII, juillet 1861, p. 312.