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MODIFICATION DES RACES

clure qu’elle est en quelque manière liée à l’apparition soudaine des caractères en question.


Modifications de races anciennes et formation de races nouvelles par le croisement. — Nous avons jusqu’ici considéré le croisement comme déterminant l’uniformité des caractères ; nous allons maintenant apprécier ses effets au point de vue opposé. Il ne peut y avoir de doute que le croisement, joint à une sélection rigoureuse continuée pendant plusieurs générations, n’ait été un moyen puissant de modifier d’anciennes races, et d’en créer de nouvelles. Lord Orford a opéré un croisement dans sa fameuse meute de lévriers avec le bouledogue, race qui fut choisie parce qu’elle manquait d’odorat, mais possédait au plus haut degré le courage et la ténacité, qualités qu’on recherchait. Au bout de six ou sept générations, toutes traces de la forme extérieure du bouledogue furent éliminées dans les descendants, mais le courage et la persévérance persistèrent. Quelques chiens d’arrêt (Pointers) ont été croisés avec la race des chiens chassant le renard (Foxhounds), pour leur donner de la fougue et de la rapidité. On a infusé quelque peu de sang de la race de Combat dans quelques familles de Dorkings ; et j’ai connu un grand éleveur de pigeons qui, dans une seule circonstance, a croisé ses Turbits avec des Barbes, pour augmenter un peu la largeur de leur bec.

Dans les exemples que nous venons de donner, les races n’ont été croisées qu’une fois, dans le but de modifier un caractère particulier ; mais dans la plupart des races améliorées du porc, qui actuellement se reproduisent exactement, des croisements réitérés ont eu lieu ; — ainsi la race Essex améliorée, doit sa valeur à des croisements répétés avec la race napolitaine, et probablement à quelque infusion de sang chinois[1]. Il en a été de même pour nos moutons anglais, dont toutes les races, la Southdown exceptée, ont été largement croisées ; c’est du reste, l’histoire de toutes nos races principales[2]. Pour en donner un exemple, les moutons Oxfordshire Downs comp-

  1. Richardson, Pigs, 1847, p. 37, 42. — Édit. Sidney de Youatt, On the pig, 1860, p. 3.
  2. W. C. Spooner, sur les croisements, Journ. Roy. Agric. Soc., vol. xx, part. II. — Ch. Howard, Gardener’s Chronicle, 1860, p. 320.