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FRUITS.

rejetons, l’un donna chaque année de beaux raisins, et l’autre en produisit beaucoup, mais de qualité inférieure, et ne mûrissant que difficilement.

Groseilliers épineux (Ribes grossularia). — Le Dr Lindley[1] a signalé un cas remarquable d’un buisson qui portait à la fois quatre sortes de baies, — rouges et velues, — lisses, petites et rouges, — vertes, — et jaunes teintées de chamois. Ces deux dernières avaient les graines rouges, et une saveur différente de celle des baies de cette couleur. De trois rameaux qui poussaient près les uns des autres sur ce buisson, le premier portait trois baies jaunes et une rouge, le second quatre jaunes et une rouge, le troisième quatre rouges et une jaune. M. Laxton m’apprend aussi qu’il a eu occasion de voir un groseillier rouge « Warrington » qui portait sur la même branche des fruits rouges et des jaunes.

Groseillier à grappes (Ribes rubrum). — Un groseillier Champagne, variété qui porte un fruit pâle intermédiaire entre le rouge et le blanc, a, pendant quatorze ans, produit, soit sur des branches différentes, soit sur la même, des fruits rouges, blancs et champagnes[2]. On pourrait soupçonner que cette variété provienne d’un croisement entre une variété rouge et une blanche, auquel cas la transformation que nous venons de voir, s’expliquerait par un retour vers les deux formes parentes, mais le cas compliqué du groseillier épineux qui précède rend cette supposition douteuse. On a observé en France un groseillier à grappes rouges, âgé de dix ans, dont une branche portait à son sommet cinq baies blanches, et plus bas, parmi des rouges, une unique baie moitié blanche et moitié rouge[3]. Alexandre Braun[4] a aussi souvent vu des branches de groseilliers blancs portant des groseilles rouges.

Poiriers (Pyrus communis). — D’après Dureau de la Malle, les fleurs de quelques poiriers d’une ancienne variété, dite doyenné galeux, ayant péri par le gel, d’autres fleurs poussèrent en juillet et produisirent six poires qui, par leur goût et la nature de la peau ressemblèrent exactement au fruit d’une variété fort distincte, le gros doyenné blanc, et aux poires bon-chrétien par la forme ; on n’a pas vérifié si cette nouvelle variété pouvait se propager par greffe ou bouture. Le même auteur ayant enté un bon-chrétien sur un coignassier, la greffe produisit, outre son fruit ordinaire, une variété d’apparence nouvelle, d’une forme particulière, et ayant une peau épaisse et rugueuse[5].

Pommiers (Pyrus malus). — Un arbre de la variété « Pound Sweet, » au Canada[6], produisit entre deux de ses fruits habituels, une pomme bien rousse, petite, d’une forme différente et à pédoncule très-court. Aucun pommier à fruits de cette couleur ne croissant dans les environs, on ne

  1. Gardener’s Chronicle, 1855, pp. 597, 612.
  2. Ibid. 1842, p. 873 ; 1855, p. 646. — Mr Mackenzie (Gard. Chron., 1866, p. 876) annonce que le même buisson continue à fournir les trois sortes de fruit, bien qu’elles n’aient pas été identiques toutes les années.
  3. Revue Horticole, citée dans Gard. Chron. 1844, p. 87.
  4. Rejuvenescence in Nature ; Bot. Mem. Ray Society, 1853, p. 314.
  5. Comptes rendus tome XLI, 1855, p. 804. Le second cas est emprunté à Gaudichaud, Comptes rendus, tome XXXIV, 1852, p. 748.
  6. Garden. Chronicle 1867, p. 403.