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FLEURS.

noter que plusieurs variétés d’aubépine, ainsi que de tilleul et de genièvre, sont très-distinctes par leur feuillage et leur facies pendant qu’elles sont jeunes, mais finissent, au bout de trente à quarante ans, par se ressembler beaucoup[1], ce qui nous rappelle le fait bien connu du Deodora, du cèdre du Liban, et de celui de l’Atlas, qui se distinguent très-facilement dans le jeune âge, mais très-difficilement lorsqu’ils sont vieux.

FLEURS.

Je ne m’étendrai pas longuement sur la variabilité des plantes qu’on ne cultive que pour leurs fleurs. Un grand nombre de celles qui ornent actuellement nos jardins, sont les descendantes de deux ou de plusieurs espèces mélangées et croisées ensemble, circonstance qui à elle seule suffit pour rendre fort difficile l’appréciation des différences qui peuvent être imputables à la variation seule. Ainsi, par exemple, nos roses, pétunias, calcéolaires, fuchsias, verveines, glayeuls, pélargoniums, etc., ont certainement une origine multiple. Un botaniste connaissant bien les formes souches, parviendrait probablement à découvrir chez leurs descendants croisés et cultivés, quelques différences de conformation, et y constaterait certainement quelques particularités constitutionnelles remarquables et nouvelles. Pour en citer quelques cas relatifs au Pélargonium, et que j’emprunte à un célèbre horticulteur, qui a spécialement cultivé cette plante, M. Beck[2] : quelques variétés exigent plus d’eau que d’autres ; il en est qui, empotées, montrent à peine une racine à l’extérieur de la motte de terre ; une variété doit avoir été empotée pendant quelque temps avant de pousser une tige à fleur ; quelques-unes fleurissent au commencement de la saison, d’autres à la fin ; il en est une[3] qui supporte une température très-élevée sans être éprouvée, et la « Blanche-fleur » semble faite pour pousser l’hiver, comme beaucoup de bulbes, et se reposer l’été. Ces particularités constitutionnelles permettraient donc à une plante de croître, à l’état de nature, dans des circonstances extérieures et sous des climats fort différents.

Au point de vue qui nous occupe, les fleurs n’ont que peu d’intérêt, car on ne leur a appliqué la sélection que pour leurs belles couleurs, leur grosseur, la perfection de leurs formes et leur mode de croissance, et sous ces différents rapports, il n’y a pas une seule fleur cultivée depuis longtemps, qui n’ait présenté des variations considérables. Le fleuriste ne s’inquiète guère de la forme et de la structure des organes de la fructification, à moins cependant qu’ils ne contribuent à la beauté des fleurs, et alors celles-ci se modifient sur des points importants : les étamines et pistils se convertissant en pétales, le nombre de ceux-ci se trouve augmenté, ce qui arrive dans les fleurs doubles. On a plusieurs fois enregistré

  1. Loudon’s Gardener’s Mag., vol. XI, 1835, p. 503.
  2. Gardener’s Chron., 1845, p. 623.
  3. Dr Beaton, Cottage Gardener, 1860, p. 377. — M. Beck, sur la Queen Mab, dans Gardener’s Chronicle, 1845, p. 226.