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GROSEILLER ÉPINEUX.

Les buissons du groseiller diffèrent par leur mode de croissance, et sont dressés, étalés, ou pendants. Les époques auxquelles ils prennent leurs feuilles et leurs fleurs varient soit absolument, soit relativement les unes aux autres. Ainsi le « Whitesmith » produit des fleurs précoces qui, n’étant pas protégées par le feuillage, ne produisent pas leurs fruits[1]. Les feuilles varient, par la grandeur, la teinte, la profondeur des lobes ; elles sont lisses, tomenteuses, ou velues sur leur surface supérieure ; les branches sont plus ou moins velues ou épineuses ; la variété « Hérisson » doit probablement son nom à l’état particulièrement épineux de ses pousses et de ses fruits. Les branches du groseiller sauvage sont, à ce que je remarque, lisses, à l’exception des épines de la base des bourgeons. Les épines elles-mêmes peuvent être petites, rares et simples, ou très-grosses et triples ; elles sont quelquefois réfléchies et très-dilatées à leur base. Le fruit varie, dans les différentes variétés, par son abondance, par l’époque de sa maturation ; en se ridant pendant qu’il pend encore à la branche, par sa grosseur ; dans quelques-unes les groseilles atteignent de fortes dimensions déjà longtemps avant leur maturité, chez d’autres elles restent petites jusqu’à ce qu’elles soient presque mûres. Le goût du fruit varie, ainsi que sa couleur ; il est rouge, jaune, vert ou blanc, — il existe une groseille d’un rouge foncé dont la pulpe est teintée de jaune ; — il peut être lisse ou velu, — ce qui est surtout le cas des groseilles blanches, et plus rare chez les rouges, — et être tellement épineux qu’on a pour cette raison donné à une variété le nom de Porc-épic de Henderson. Deux variétés ont leur fruit mûr couvert d’une fleur pulvérulente. Le fruit varie encore par l’épaisseur et le veinage de sa peau, et enfin par sa forme, qui peut-être sphérique, oblongue ou ovalaire[2].

J’ai cultivé cinquante-quatre variétés du groseiller, et, vu les différences énormes qui existent entre les fruits, j’ai été frappé de la grande similitude de toutes leurs fleurs. Je n’ai pu trouver que dans un petit nombre quelques traces de différence dans la grosseur et la couleur de la corolle. Le calice diffère un peu plus, étant plus rouge dans quelques groseillers que dans d’autres, surtout dans un groseiller blanc où il était particulièrement coloré ; il diffère encore par la partie basilaire du calice, qui peut être lisse ou velue, ou couverte de poils glanduleux. Je dois signaler, comme contraire à ce qu’on aurait pu attendre de la loi de corrélation, la présence d’un calice très-velu chez un groseiller rouge à fruit lisse. Les fleurs du « Sportsman » sont pourvues de grandes bractées colorées ; c’est la plus singulière déviation de structure que j’aie observée. Elles variaient encore beaucoup par le nombre des pétales, parfois par celui des étamines et des pistils, et avaient donc une conformation un peu monstrueuse, quoique produisant beaucoup de fruit. M. Thompson a remarqué sur le groseiller « Pastime » la présence fréquente de bractées supplémentaires attachées sur les côtés du fruit[3].

  1. Loudon’s Gardener’s Magazine, vol. IV, 1828, p. 112.
  2. Les renseignements les plus complets sur le groseiller se trouvent dans le travail de M. Thompson, Trans. Hort. Soc., vol. I (2e  série), 1835, p. 218, auquel j’ai emprunté la plupart des faits donnés ci-dessus.
  3. Catalogue of Fruits of Hort. Soc., 1842.