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MAIS.

nus, étaient cachés dans des glumes longues de onze lignes, se trouvait sauvage au Brésil. Il est à peu près certain que la forme primitive doit avoir eu ses graines ainsi protégées[1], mais celles de la variété brésilienne, d’après ce que j’apprends du professeur Asa Gray, et de ce que je trouve dans deux publications, donnent tantôt du maïs commun, tantôt du maïs à glumes, et on ne peut guère admettre qu’une espèce sauvage puisse varier si promptement et si fortement dès la première culture.

Le maïs a varié d’une manière extraordinaire. Metzger[2], qui a étudié avec une attention toute particulière la culture de cette plante, y distingue douze races (Unterart), comprenant de nombreuses sous-variétés, parmi lesquelles il en est de très-constantes, et d’autres qui ne le sont pas. Les différentes races peuvent, quant à la hauteur, varier de 15–18 pieds à 16–18 pouces, comme dans une variété naine décrite par Bonafous. L’épi varie de forme, et peut être long et étroit, ou court et épais, ou branchu. Il existe une variété dans laquelle l’épi est plus de quatre fois plus long que dans la variété naine. Les grains peuvent être disposés sur l’épi en rangées variant de six à vingt, ou être placés irrégulièrement. Quant à la couleur, ils peuvent être blancs, jaune pâle, orangés, rouges, violets, ou élégamment bigarrés de noir[3], et on rencontre quelquefois des grains de deux couleurs sur un même épi. J’ai trouvé que, en poids, un seul grain d’une variété pouvait être égal à celui de sept d’une autre. La forme des grains varie beaucoup ; ils peuvent être aplatis, globuleux ou ovales, plus larges que longs, ou plus longs que larges, sans pointe, ou se prolongeant en une dent aiguë, qui est quelquefois recourbée. Une variété (rugosa de Bonafous) a les grains ridés, d’où un aspect singulier de tout l’épi. Une autre (cymosa de Bonafous) porte des épis si serrés les uns contre les autres, qu’on l’a appelée maïs à bouquet. Les grains de quelques variétés contiennent de la glucose au lieu de fécule. Des fleurs mâles apparaissent quelquefois parmi des fleurs femelles, et M. J. Scott a récemment observé le cas plus rare, de fleurs femelles sur une panicule mâle, et aussi des fleurs hermaphrodites[4]. Azara a vu au Paraguay[5], une variété dont les grains sont très-tendres, et a constaté que plusieurs autres sont susceptibles d’être apprêtées de diverses manières. Il y a dans les variétés des différences dans la précocité, et dans leur aptitude à résister à la dessiccation et à l’action des vents violents[6]. Parmi les différences que nous venons de mentionner, il en est un certain nombre, auxquelles on eût certainement accordé une valeur spécifique, s’il se fût agi de plantes à l’état de nature.

D’après le comte Ré, les graines de toutes les variétés cultivées par lui,

    dolle, O. C., p. 951.) M. Teschemacher dans Proc. Boston Soc. nat. Hist. 19 Oct. 1842, donne un récit de la semaille de ses graines.

  1. Moquin-Tandon, Éléments de tératologie, 1841, p. 126.
  2. O. C., 1841, p. 208. J’ai modifié quelques assertions de Metzger d’après des renseignements consignés dans le grand ouvrage de Bonafous, Hist. nat. du maïs, 1836.
  3. Godron, O. C., t. II, p. 80 ; — Alph. de Candolle, O. C., p. 951.
  4. Transactions Bot. Soc. Edinburgh, vol. VIII, p. 60.
  5. Voyages dans l’Amér. mérid., t. I, p. 147.
  6. O. C., p. 31.