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FROMENT.

avait les épis petits, et ses grains étaient moins gros, plus courts, plus compactes que dans l’espèce que nous cultivons ; ils avaient (sans les glumes), 2 1/2 lignes de long, et 1 1/2 de large, tandis que dans notre espèce, ils atteignent pour la même largeur une longueur de 3 lignes[1]. Heer croit que ces variétés de froment et d’orge à petits grains sont les formes parentes de certaines variétés voisines actuelles, qui ont supplanté leurs premiers ancêtres.

Heer donne un intéressant aperçu de la première apparition et de la disparition finale des diverses plantes qui, pendant d’anciennes périodes successives, ont été cultivées en Suisse en plus ou moins grande abondance, et qui généralement différaient de nos variétés actuelles. L’espèce la plus commune pendant la période de pierre, était la forme de froment à petits grains et épis dont nous venons de parler ; elle a duré jusqu’à l’époque helvético-romaine, et a disparu. Une seconde forme, d’abord rare, devint plus tard plus abondante. Une troisième, le froment égyptien (T. turgidum), qui était rare pendant l’époque de pierre, n’est pas identique à la variété actuelle. Une quatrième (T. dicoccum), diffère de toutes les variétés connues de cette forme. Une cinquième (T. monoccum), dont on a pu reconnaître l’existence pendant la période de pierre, grâce à la découverte d’un épi unique. Une sixième sorte, le T. spelta commun, n’a été introduite en Suisse qu’à l’âge du bronze. Quant à l’orge, outre la forme à épis courts et à petits grains, deux autres étaient encore cultivées, dont une, assez rare, ressemblait à notre H. distichum commun. Le seigle et l’avoine ont été introduits pendant l’âge de bronze ; les grains d’avoine étaient quelque peu plus petits que ceux de nos variétés actuelles. Le pavot était largement cultivé pendant la période de pierre, probablement pour son huile, mais on ne connaît pas la variété qui existait alors. Un pois particulier à petits grains, a duré de l’âge de pierre à celui du bronze, et s’est alors éteint ; tandis qu’une fève, ayant également les graines petites, a apparu lors de la période du bronze, et a duré jusqu’au temps des Romains. Ces détails ressemblent aux descriptions que peut donner un paléontologiste, des muta-

  1. Heer, cité par C. Vogt, Leçons sur l’Homme, p. 463.