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PIGEONS DOMESTIQUES.

demment du Pigeon Heurté, était, ainsi que la poitrine, d’un bleu un peu plus pâle que chez le Bizet. Ainsi deux Barbes noirs, un Pigeon Heurté rouge et un Pigeon Paon blanc ont, comme grands-parents de pure race, donné naissance à un oiseau ayant la même couleur générale et toutes les marques caractéristiques de la C. livia sauvage.

Pour ce qui concerne le fait que les croisements des races produisent souvent des oiseaux tachetés de noir, et ressemblant sous tous les rapports au Pigeon de colombier et à la variété tachetée du Bizet sauvage, l’assertion rappelée ci-dessus de MM. Boitard et Corbié pourrait suffire ; je citerai cependant trois exemples de l’apparition de pareils oiseaux dans des croisements où l’un des parents ou grands-parents était bleu, mais non tacheté. J’ai croisé un Turbit bleu mâle avec un Tambour blanc, et, l’année suivante, avec un Culbutant courte-face d’un brun plombé foncé ; les produits du premier croisement furent aussi bien tachetés qu’aucun Pigeon de colombier, et ceux du second le furent au point d’être presque aussi noirs que les Bizets tachetés les plus foncés de Madère. Un autre oiseau, dont les grands-parents furent un Tambour blanc, un Paon blanc, un Heurté blanc (taches rouges), un Runt rouge et un Grosse-gorge bleu, fut bleu ardoisé et tacheté exactement comme un Pigeon de colombier. Je puis ajouter ici une remarque de M. Wicking, l’homme d’Angleterre qui a le plus d’expérience dans l’élevage des Pigeons de diverses couleurs ; c’est que quand un oiseau bleu, ou bleu et tacheté, ayant des barres alaires noires, paraît une fois dans une race, et qu’on le laisse reproduire, ces caractères se transmettent avec une telle énergie, qu’il est excessivement difficile de les extirper.

Que devons-nous donc conclure de cette tendance qu’offrent toutes les principales races domestiques, lorsqu’elles sont pures et qu’on les croise entre elles, à donner naissance à des produits bleus, portant les mêmes marques caractéristiques que le Bizet, et variant comme lui ? Si nous admettons la descendance de toutes ces races de la C. livia, aucun éleveur n’hésitera à expliquer cette apparition occasionnelle d’oiseaux bleus avec les marques noires, par le principe bien connu de la réversion, ou retour vers le type originel. Nous ne savons pas positivement pourquoi le croisement détermine si fortement