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PIGEONS DOMESTIQUES.

naire, la variabilité est due au changement des conditions extérieures ; d’après la doctrine de Pallas, la variabilité, ou l’apparition de caractères nouveaux, est due à quelque effet mystérieux, résultat du croisement de deux espèces, ne possédant ni l’une ni l’autre les caractères en question. On peut croire que, dans quelques cas peu nombreux (et encore plusieurs raisons le rendent peu probable), il a pu naître, de croisements, des races bien accusées ; par exemple, un Barbe aurait pu se former par un croisement entre un Messager à long bec, ayant un large cercle de peau verruqueux autour des yeux, et un Pigeon à bec court. On peut même admettre comme presque certain que beaucoup de races ont été à quelque degré modifiées par des croisements, et que certaines variétés de nuances de coloration proviennent de croisements entre des variétés diversement colorées. Nous devons donc, d’après la doctrine que les différentes races doivent leurs différences caractéristiques à leur descendance d’espèces distinctes, admettre qu’il existe encore quelque part, ou qu’il a autrefois existé, huit ou neuf ou plus probablement une douzaine d’espèces, actuellement éteintes comme oiseaux sauvages, et ayant toutes eu les mêmes habitudes, vivant en société, perchant et faisant leurs nids sur les rochers. Mais si on considère avec quel soin on a, dans le monde entier, recueilli les Pigeons sauvages, oiseaux remarquables, surtout lorsqu’ils vivent dans les rochers, il est extrêmement improbable que huit ou neuf espèces, domestiquées depuis longtemps, et qui ont donc dû habiter un pays anciennement connu, puissent encore exister à l’état sauvage, et avoir échappé aux ornithologistes.

L’hypothèse que ces espèces ayant existé autrefois, se soient éteintes depuis, pourrait être un peu plus probable, quoiqu’il soit passablement téméraire d’admettre, dans les limites de l’époque historique, l’extinction d’un aussi grand nombre d’espèces, lorsqu’on voit le peu d’influence que l’homme a pu avoir sur l’extermination du bizet commun, qui, sous tous les rapports, se rapproche tellement des races domestiques. Le C. livia existe actuellement et prospère dans les petites îles Feroë, sur un grand nombre d’îles de la côte d’Écosse, en Sardaigne, sur les rives de la Méditerranée et dans le centre