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DIFFÉRENCES DES SQUELETTES.

races qu’à de nombreuses reprises on avait enfermées avec eux.

Si l’histoire des lapins de Porto-Santo n’eût pas été connue, la plupart des naturalistes, voyant leur taille réduite, leur coloration rougeâtre en dessus et grise en dessous, l’absence de noir sur la queue et à l’extrémité des oreilles, les auraient regardés comme une espèce distincte. Cette manière de voir eût été fortement confirmée par le fait qu’ils refusaient au Jardin zoologique tout rapprochement avec d’autres lapins. Et cependant l’origine de ce lapin, qui, sans aucun doute, aurait été classé comme espèce distincte, ne remonte pas au delà de l’année 1420. Enfin, les trois cas de lapins redevenus sauvages à Porto-Santo, à la Jamaïque et aux îles Falkland nous montrent que ces animaux, soumis à de nouvelles conditions d’existence, ne conservent pas et ne font pas nécessairement retour à leurs caractères primitifs, comme on l’a si généralement affirmé.

CARACTÈRES OSTÉOLOGIQUES.

Si on considère, d’une part, combien on a souvent affirmé que les parties essentielles de la conformation ne variaient jamais, et d’autre part, les faibles différences du squelette sur lesquelles on a fondé les espèces fossiles, la variabilité qui affecte le crâne et quelques autres os du lapin domestique est bien digne de toute notre attention. Il ne faut pas croire que les différences importantes que nous allons décrire caractérisent strictement une race donnée, mais on peut en dire qu’elles existent généralement dans certaines races. Nous devons avoir présent à l’esprit que la sélection n’a jamais été exercée en vue de fixer quelque caractère du squelette, et que les animaux n’ont pas eu à se maintenir par eux-mêmes dans des conditions ambiantes uniformes. Nous ne pouvons nous rendre compte de la plupart des différences du squelette, mais nous reconnaîtrons que l’augmentation de la taille, résultat d’une alimentation abondante et d’une sélection soutenue, a affecté la tête d’une certaine manière ; et que même l’allongement et la chute des oreilles ont influé en quelque mesure sur la forme générale du crâne. Le défaut d’exercice a aussi, selon toute