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LEURS VARIATIONS.

offrent des différences marquées dans la forme de leurs crânes[1]. Les lapins à grandes oreilles d’Angleterre pèsent souvent 8 ou 10 livres ; on en a même exposé un pesant 18 livres, tandis qu’un lapin sauvage adulte ne pèse que 3 livres et quart. Le crâne, dans les lapins à oreilles pendantes que j’ai examinés, est, relativement à sa largeur, plus long que dans le lapin sauvage. Ils ont souvent sous la gorge des replis lâches de peau ou fanons qu’on peut étirer jusqu’à atteindre l’extrémité de la mâchoire. Les oreilles sont prodigieusement développées et pendent de chaque côté de la tête. On a montré un de ces lapins dont les deux oreilles étendues mesuraient ensemble 22 pouces de longueur ; chaque oreille ayant 5 pouces 3/8 de large. Dans un lapin sauvage, j’ai trouvé 7 pouces 5/8 pour la longueur totale des deux oreilles mesurées bout à bout, et seulement 1 pouce 7/8 pour la largeur. Dans les grandes races de lapins, le poids du corps et le développement des oreilles étant surtout les qualités recherchées et primées dans les concours, ce sont celles auxquelles on a appliqué la sélection avec le plus de soin.

Le lapin couleur lièvre ou belge, comme on l’appelle quelquefois, ne diffère que par la couleur des autres grandes races ; mais M. Young, de Southampton, grand éleveur de cette sorte de lapins, m’apprend que toutes les femelles qu’il a examinées n’avaient que six mamelles ; c’était aussi le cas de deux femelles que j’ai eues en ma possession. M. B. P. Brent, m’assure toutefois que dans les autres lapins domestiques le nombre en est variable. Le lapin sauvage en a toujours dix. Le lapin angora est remarquable par la longueur et la finesse de sa toison, qui est encore très-longue sur la face plantaire des pieds. C’est la seule race qui paraisse différer des autres par ses qualités morales, car elle est plus sociable, et le mâle ne cherche pas à détruire sa progéniture[2]. On m’a apporté de Moscou, deux lapins vivants de la grosseur de l’espèce sauvage, mais ayant une fourrure douce et longue différant de celle de l’angora. Ils avaient les yeux roses et étaient d’un blanc de neige, à l’exception des oreilles, de deux taches près du nez,

  1. Journal of Horticulture, 1861, p. 108.
  2. Journal of Horticulture, 1861, p. 380.