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DROSERA ROTUNDIFOLIA.

le tentacule flexible ; or, bien que la pression ainsi opérée ait dû être mille fois plus grande que celle opérée par le poids des parcelles ci-dessus décrites, pas un seul tentacule ne s’est infléchi. Dans une autre occasion, j’ai touché quarante-cinq glandes sur onze feuilles, une, deux et même trois fois avec une aiguille ou avec un pinceau assez rude. Cet attouchement a été fait aussi rapidement que possible, mais avec assez de force pour incliner les tentacules ; cependant, six seulement s’infléchirent, trois d’une façon apparente et trois très-légèrement. Afin de m’assurer si les tentacules qui n’avaient pas été affectés se trouvaient à l’état actif, je plaçai sur dix d’entre eux des petits morceaux de viande, et tous s’infléchirent bientôt de façon très-apparente. D’autre part, quand on répète sur un grand nombre de glandes quatre, cinq ou six fois de suite l’attouchement que je viens d’indiquer, avec une aiguille ou un éclat aigu de verre, une proportion beaucoup plus grande des tentacules s’infléchissent ; mais le résultat est si incertain, qu’on pourrait presque l’appeler capricieux. Par exemple, je touchai, ainsi que je viens de le dire, trois glandes qui se trouvaient extrêmement sensibles, et les trois tentacules s’infléchirent presque aussi rapidement que si j’avais placé des morceaux de viande sur les glandes. Dans une autre occasion, j’exerçai une seule pression très-vive sur un nombre considérable de glandes, et pas un tentacule ne se mit en mouvement ; mais, en exerçant, quelques heures après, quatre ou cinq attouchements sur ces mêmes glandes avec une aiguille, plusieurs tentacules s’infléchirent aussitôt.

Le fait qu’un, deux ou même trois attouchements ne causent pas d’inflexion doit être fort utile à la plante. En effet, pendant le mauvais temps, il est à peu près certain que les glandes doivent être touchées par les herbes ou par les plantes qui croissent auprès d’elles ; or, ce serait un grand malheur pour elles si ces attouchements suffi-