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PINGUICULA VULGARIS.

qu’un insecte a été poussé sur une certaine distance vers le centre du limbe, le redressement immédiat des bords doit être avantageux pour la plante, car ces mêmes bords ne peuvent capturer une nouvelle proie qu’à la condition de s’être d’abord redressés. Les services rendus à la plante par cette poussée, aussi bien que celui rendu par le contact, quelque court qu’il soit, des glandes marginales avec la surface supérieure des petits insectes capturés, suffisent peut-être à expliquer les mouvements particuliers des feuilles du Pinguicula ; autrement, il faut regarder ces mouvements comme le reste de facultés plus développées que possédaient autrefois les ancêtres du genre.

Chez les quatre espèces britanniques et, comme me l’apprend le professeur Dyer, chez toutes, ou chez presque toutes les espèces du genre, les bords des feuilles sont naturellement plus ou moins recourbés de façon permanente. Cette position sert, comme nous l’avons déjà vu, à empêcher les insectes d’être entraînés par la pluie ; elle sert, en outre, à atteindre un autre but. Quand un grand nombre de glandes ont été énergiquement excitées par des morceaux de viande, des insectes ou tout autre objet, la sécrétion découle souvent sur la feuille et les bords recourbés l’empêchent de tomber en dehors et de se perdre. À mesure que cette sécrétion traverse le canal ainsi formé, de nouvelles glandes sont mises à même d’absorber les matières animales qu’elle contient en solution. En outre, la sécrétion se réunit souvent en petits amas dans le canal ou vers le sommet de la feuille qui ressemble alors à une cuiller ; or, je me suis assuré que des morceaux d’albumine, de fibrine et de gluten se dissolvent plus rapidement et plus complètement au milieu de ces amas qu’ils ne le font sur la surface de la feuille là où la sécrétion ne peut pas s’accumuler ; il doit en être de même pour les insectes capturés naturellement. J’ai vu la sécrétion se rassembler ainsi bien des fois sur les feuilles de plantes