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DIONÆA MUSCIPULA.

Neuvième expérience. — Je plaçai sur une feuille un cube très-compacte, ayant 1/10e de pouce (2,54 millim.) de côté de bœuf rôti ; la feuille se rouvrit spontanément au bout de douze jours. Il restait alors tant de sécrétions faiblement acides sur la feuille, que cette sécrétion s’écoula au moment de la réouverture. La viande avait été complètement désagrégée, mais elle n’était pas entièrement dissoute ; il n’y avait aucune trace de moisissure. Je plaçai sous le microscope le morceau qui restait ; quelques fibrilles du centre avaient encore leurs stries transversales ; les stries avaient disparu complètement sur d’autres fibrilles, et on pouvait établir une gradation parfaite entre ces deux états. Il restait, en outre, des globules qui me parurent être de la graisse, et quelques parties de tissu fibre-élastique qui n’avaient pas été digérées. En un mot, la viande se trouvait dans cet état de demi-digestion que nous avons déjà décrit en nous occupant du Drosera. La Dionée semble digérer la viande, de même que l’albumine, plus lentement que ne le fait le Drosera. À l’extrémité opposée de la même feuille, j’avais placé une boulette de pain fortement comprimée ; cette boulette était complètement désagrégée, grâce, je crois, à la digestion du gluten par la feuille ; elle était toutefois très-peu réduite en volume.

Dixième expérience. — Je plaçai aux deux extrémités d’une même feuille un cube de fromage ayant 1/20e de pouce (1,27 millim.) de côté, et un cube d’albumine. Au bout de neuf jours les lobes s’ouvrirent spontanément, mais dans une faible proportion à l’extrémité où se trouvait le fromage, qui semblait avoir été peu dissous, bien qu’il fût amolli et qu’il baignât dans la sécrétion. Deux jours plus tard, c’est-à-dire onze jours après la fermeture des lobes, la feuille se rouvrit spontanément du côté où avait été placée l’albumine ; il n’en restait plus qu’une très-petite quantité noircie et desséchée.

Onzième expérience. — Je répétai la même expérience avec du fromage et de l’albumine sur une autre feuille qui me semblait à l’état peu actif. Au bout de six jours, les lobes se rouvrirent spontanément à l’extrémité où se trouvait le fromage qui était considérablement ramolli, mais qui n’était pas dissous, et dont le volume avait très-peu diminué. Douze heures après, l’extrémité où se trouvait l’albumine se rouvrit à son tour ; le morceau d’albumine s’était alors transformé en une grosse goutte de liquide transparent, visqueux et non acide.

Douzième expérience. — Je répétai les deux dernières expériences ; cette fois encore l’extrémité de la feuille contenant le fro-