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III. — LES AFGHANS DE L’ÉMIR ET L’ÉMIR

pire dourani s’étendait de Hérat au Soutledj et de Bactres à la mer des Indes[1].

Ahmed Chah Dourani, dont le nom est inconnu en Europe, méritait de prendre place dans l’imagination des peuples à côté des grands exterminateurs. Bien que son empire ne lui ait pas survécu, son œuvre pourtant, et dans un sens qu’il ne soupçonnait guère, a été plus durable et plus profonde que celle de Nadir Chah ; car c’est par sa main que le destin a fait signe que l’Inde serait anglaise. À la date de 1761, l’empire mogol se décomposait ; une puissance nouvelle, les Mahrattes, sortie des repaires des Ghattes, montait au Nord, relevait la tradition de la nationalité indoue en face des envahisseurs musulmans, faisait le Grand Mogol prisonnier à Delhi. L’Inde redevenait indoue, et les Mahrattes disaient : « l’Inde aux Indous, de l’Himalaya au cap Comorin. » C’est en ce moment que parut le roi Dourani, avec ses bandes afghanes, renforcées des troupes mogoles ; le 7 janvier toute l’Inde indoue et toute l’Inde musulmane se rencontrèrent à Panipat, 250, 000 Hindous et 200, 000 Musulmans. Ce fut le choc le plus effrayant que l’Asie eût encore vu depuis Bajazet et Tamerlan : l’armée mahratte fut anéantie et

  1. Mountstuart Elphinstone, The Kingdom of Caubool.