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LETTRES SUR L’INDE

envoient leurs cimes vous rejoindre tout le long de l’ascension, et c’est un plaisir de jeter hors du palanquin un regard sur le vertige d’en bas, et de se sentir monter sans effort sur l’abîme toujours plus profond et toujours vert.

En l’an 1193, comme les soldats de l’Islam montaient à l’assaut de Taragarh, les Hindous roulèrent sur eux du sommet une roche immense, qui descendit, écrasant les rangs l’un après l’autre : elle allait emporter toute l’armée des assaillants, quand Séid Houssain lui cria : « Arrête-toi ! » et la voici là, à votre gauche, là où la parole du Séid l’a fixée. Le sanctuaire du saint lui-même et des martyrs est là-haut et a fait d’Ajmir Ajmir la Sainte.

Tout en bas, dans un recoin caché de verdure, est la merveille d’Ajmir, l’Arhâi dinkâ, « la mosquée des Deux-Jours-et-demi. » Le conquérant était pressé d’avoir un temple digne de lui et d’Allah : il y avait là un de ces grands temples à la façon djaïne, au vaste cloître peuplé de chapelles : un Vandale de génie, quelque humble mistri converti, abattit les chapelles idolâtres, pour laisser place au flot des fidèles, et lança en travers sept arches colossales, pour abriter la chaire et l’ombre d’Allah. Le temps a, depuis, fait son œuvre, et, à présent, quand vous montez l’immense escalier de pierre rouge et qu’au der-