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LETTRES SUR L’INDE

à qui l’abeille n’ose emprunter de sucs pour son miel : entendez-vous la chanson ?

Tchampa todjmen tin goun…

Fleur de tchampa, vous avez trois vertus :
la beauté, la couleur, le parfum,
mais vous avez un grand malheur :
l’abeille ne vient pas se poser près de vous.

J’avais reçu du prêtre et gardais avec amour, entre les feuillets d’un livre, une fleur de tchampa ; j’y avais joint plus tard une de ces fleurs de Mahomet, qui croissent près de la passe de Khaiber et portent l’empreinte protectrice des doigts du Prophète ; plus tard encore, une feuille du figuier qui pousse devant le temple de Bouddha-Gaya, à la place même où le Bouddha, pour la première fois, entra dans l’évanouissement. De retour en France, j’ai cherché en vain et la fleur de tchampa et la fleur du Prophète, et de toute ma guirlande indienne il ne restait que la fleur de néant.

Vous redescendez au soleil, le long du Nakhi Talab, ou « le lac de l’Ongle, » ainsi nommé parce qu’il fut creusé par l’ongle d’un ascète, et qui est plus pur et plus joli que jamais ongle, je ne dis point d’ascète, voire d’Apsaras ou de