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XIV. — DE LAHORE À PARIS

fendue avec énergie dans le Sénat par un Espagnol, le professeur Pedrazza, le véritable créateur du mouvement français.

M. Pedrazza avait enseigné le français à un grand nombre de jeunes Parsis. Une sorte de curiosité reconnaissante poussait les Parsis à cette étude : ils savaient que c’était un Français, Anquetil Duperron, qui avait révélé leurs livres sacrés à l’Europe, et un autre Français, Eugène Burnouf, qui les avait déchiffrés. Ils avaient trouvé en M. Pedrazza un maître enthousiaste. Espagnol isolé dans l’Inde, M. Pedrazza, ne pouvant espérer de rien faire là pour la langue et la gloire de son pays, s’était élevé à une forme plus haute de patriotisme, le patriotisme latin. Le français était, par la supériorité de sa littérature autant que par son utilité pratique, le seul représentant que la tradition latine pût dans l’Inde mettre en regard de la tradition saxonne, et il avait reporté sur lui toute l’ardeur et l’énergie de son patriotisme espagnol. Il avait été récompensé au delà de toute attente.

L’opposition fut vive au sein du Sénat. Les partisans des études classiques disaient que l’introduction du français était le coup de grâce porté au latin. On leur répondit que c’était un vivant remplaçant un mort ; que le français était une école de goût littéraire aussi parfaite que