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LETTRES SUR L’INDE

L’homme, c’est Séid Ahmed, le fondateur du parti musulman libéral ; le collège, c’est l’Institut Anglo-oriental, fondé par le Séid, pour instruire la jeunesse musulmane à la fois dans la tradition nationale et dans la civilisation européenne.

« Le Musulman, voilà l’ennemi ! » Telle est, depuis la grande rébellion, la pensée intime des Anglais. Traité en ennemi ou en suspect, le Musulman s’est tenu à l’écart ; et le résultat, c’est que partout l’Hindou a pris le pas sur lui, à mesure que le gouvernement a ouvert aux indigènes l’accès des carrières publiques. La haine du Babou Bengali a dessillé l’œil des Musulmans ; du moins des plus éclairés. Séid Ahmed a été leur guide. Il a prêché le No rochnai, la Lumière nouvelle ; il a concilié le Coran avec la science, il a annoncé que tout dans le monde se fait par voies naturelles : ses adversaires l’appellent le nétcheuri, parce qu’il fait sans cesse appel à nétcheur (nature). Ses ennemis les plus ardents, il les a naturellement trouvés parmi les Musulmans dévots, pour lesquels, tout fils du prophète qu’il est, il n’est qu’un athée : un bon Musulman, à qui je demandais ce qu’il pensait de Séid Ahmed, me dit : Je ne sais pas ce qu’il est, mais c’est un homme qui a fait beaucoup de mal à la religion.