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XII. — LA CONFESSION DU MOUNCHI

tant que Piro est en vie : il demanda à Bouta Djan de l’empoisonner : elle refusa. Alors il dit à Piro : Viens ce soir à Dhamtor, à l’endroit où est le grand souterrain, et je te montrerai un coq qui est là, grand comme un cheval. Piro alla, car il n’est pas très fin, n’ayant encore que seize ans : il y avait là un sipaie qui devait le tuer et à qui Zebehr avait donné pour cela dix roupies. Heureusement, Piro, au moment d’entrer dans le souterrain, eut peur : il n’est pas très brave, car il n’a encore que seize ans, et c’est ainsi qu’il échappa.

« Mais que faire, Sab ? Mes frères qui habitent à Dodial disent que je dois tuer Zebehr. C’est vrai, Sâb, je devrais le tuer ; c’est la loi afghane, c’est le Nangi Pukhtâna. Je devais le tuer. J’aurais déjà dû le tuer, tout de suite. Ils me disent que si je ne le tue pas, ils ne m’adresseront plus la parole, qu’ils me renieront, que je déshonore la famille. Oui, Sâb, je devrais le tuer. Mais vous savez, Sâb, je ne suis pas un homme de sang. Je suis un homme de piété, qui crois en Dieu. Il vaut mieux supporter sans rien dire et pardonner, en priant Dieu de punir le coupable : Dieu venge toujours ceux qui ne se vengent pas. Et puis, si je le tuais, le gouvernement me pendrait. Que faire, Sâb ? je suis bien perplexe. »