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XII. — LA CONFESSION DU MOUNCHI

vieux. Il n’est pas encore très savant et ne sait pas bien lire, mais il n’a encore que seize ans. Il y a huit ans, j’ai acheté à un ami pauvre une petite fille pour en faire la fiancée de mon fils, selon la coutume des Afghans[1]. j’aimais beaucoup Bouta Djan, et lui apprenais à lire le Coran illustre ; elle disait toutes ses prières, et j’étais heureux que Piro eût une fiancée si vertueuse. Or, avec mon fils et ma future bru, j’élevais aussi, par bonté d’âme, le frère de ma femme : ma femme vient des montagnes de Kaghan, qui sont un pays de vrais sauvages et d’ignorants, et par amitié pour elle et pour son père, Nour Ahmed, qui est un homme respecté et un Pir, j’élevais ce garçon qui était un vrai sauvage et un ignorant : je voulais faire de lui un bon Musulman et je lui enseignais le Coran illustre, en compagnie de Piro et de sa fiancée.

« L’an dernier, comme vous sayez, le Lieutenant-gouverneur, qui m’admire beaucoup, m’a emmené avec lui à Simla pour lui apprendre le persan. Je restai quatre mois avec lui. C’était un grand honneur, et une des joies de ma vie ; mais ce fut aussi un grand malheur. Pendant que j’étais à Simla, Zebehr, — c’est le nom du mauvais garçon,  — m’écrivait toujours pour me

  1. Voir plus haut, page 113.