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XII. — LA CONFESSION DU MOUNCHI

de boucs : le Soubehdar engagea le bouc que je lui avais donné : au premier coup de corne, le bouc s’enfuit à toutes jambes. Le Soubehdar était furieux ; il me dit : « Le sale bouc ! reprends-le ! » Je repris le bouc : j’étais un peu honteux, mais pas trop mécontent : je le menai au boucher qui m’en paya cinq roupies ; je l’avais acheté pour trois, de façon que ce bienheureux bouc m’avait fait gagner et mon entrée au régiment et deux roupies par-dessus le marché. Je compris que Dieu commençait à prendre merci de moi.

« Or, il y avait un capitaine qui voulait apprendre le pouchtou pour l’examen : il envoya un Afghan demander dans tout le bazar : « Y a-t-il un savant qui puisse enseigner le pouchtou à un Sâb ? » Et l’homme ne trouvait pas. Un jour, il me vit occupé à lire un livre et il me demanda : « Qu’est-ce que tu fais ? » Je répondis : « Je lis le Divan d’Abdaul Rahman. — Qui est-ce, Abdoul Rahman ? — C’est un grand poète afghan. — Tu pourrais enseigner l’afghan au capitaine ? — Certainement. » J’allai donc chez le capitaine et il commença à me demander en hindoustani ce que signifiait le pouchtou dér. Je ne connaissais pas encore l’hindoustani, car ma langue maternelle était le pouchtou ; j’avais bien appris le persan et l’arabe, mais je