Page:Darmesteter - Lettres sur l’Inde, à la frontière afghane.djvu/283

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
241
XII. — LA CONFESSION DU MOUNCHI

sous le British Raj[1]. Ibrahim est Fellow de l’université du Pendjab et du Sindh : c’est le premier Afghan, et jusqu’a présent le seul, qui ait le droit d’apposer à son nom les lettres capitales F. U. P. S. er il le ferait sans aucun doute s’il savait écrire — je veux dire écrire l’anglais. Ibrahim est durbari ; autrement dit, il a un siège aux durbars, c’est-à-dire aux assemblées officielles tenues par le lieutenant-général du Pendjab ou par le vice-roi de l’Inde : il a le fauteuil 327 et tandis qu’il y a des Khans et des Nawabs qui assistent debout ou accroupis à terre, lui, le pauvre hère de Dodial, siège dans la soie du Fellow, enfoncé, comme dit chez nous la nouvelle école, dans la rotondité et la mollesse d’un fauteuil gouvernemental. Il est riche, car il ne donne pas de leçon à moins de trente roupies par mois (autant dire soixante francs), et il a souvent jusqu’a cinq élèves à la fois : tous les candidats à l’examen de pouchtou[2], premier et second degré, se tournent vers lui comme vers leur providence. Il a composé un livre étonnant, intitulé Khizanahi Afghani, ce qui signifie « le Trésor afghan » : et en effet c’est un véritable trésor, un livre sans

  1. La domination anglaise.
  2. Tous les officiers de l’armée de la frontière doivent passer un examen de langue afghane.