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LETTRES SUR L’INDE

Brahmane verse sur le cou l’eau et le riz et attend qu’il secoue le riz : quand il l’a secoué, c’est signe qu’il est prêt pour le sacrifice et tandis qu’un homme le tient par la queue, le sacrificateur lui abat la tête d’un coup de kirki : un coup de fusil annonce la chute de la tête et accompagne le bruit de la brute qui croule :

Sternitur exanimisque tremens procumbit humi bos…

c’est le sacrifice romain conservé au pied de l’Himalaya et vous vous sentez rajeuni de deux mille ans. Le sang ruisselle du cou de l’animal ; les hommes se précipitent et plongent dans le ruisseau rouge les colliers de leurs femmes et de leurs filles : cela leur portera bonheur : puis le tronc est traîné autour de l’autel. Trois taureaux sont ainsi immolés tour à tour. Comme intermède, on sacrifie quelques malheureuses chèvres, qui, la tête tranchée, gigottent lamentablement pendant quelques secondes de leurs pieds de derrière : le cérémonial est le même, seulement elles ne sont pas attachées à l’autel. Le troisième taureau achevé, c’est une véritable boucherie ; une vingtaine de Gourkhas amènent chacun leur chèvre dans l’enceinte sanglante et, tandis que la pauvrette étourdie reste immobile, ne sachant ce qu’on lui veut,