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IX. — PHILOSOPHIE AFGHANE

qu’est-il devenu votre Mahdi ? — Ce qu’il est devenu ? mon Dieu, il est mort. — Ah ! il est mort ! Un Mahdi qui meurt ! » fait le Séid avec un geste de pitié, J’avais oublié et nous avions tous oublié en Europe que le Mahdi doit naître à la Mecque. Aussi, si les Anglais étaient moins ignorants, ils s’épargneraient la peine inutile et ridicule de faire vacciner tous les enfants dans l’Inde ; car vous savez qu’un des signes du Mahdi est qu’il aura du lait dans les veines, et c’est pour cela que le vice-roi fait vacciner tous les enfants, afin de découvrir, à la blancheur du sang, l’enfant prédestiné, et de le mettre à mort.

Pour faire la paix avec le Séid, je lui parle du grand empereur afghan, Ahmed Chah, le Dourani, qui écrasa les Mahrattes et le Grand Mogol et régna de Hérat et Kandahar jusqu’au Soutledj et jusqu’à Delhi ; a mon grand étonnement, il reste froid. « Ahmed Chah, lui dis-je, n’était-il pas un grand homme ? — Non ! il n’y a pas de grands hommes : il y a eu des hommes et il y en a beaucoup qui valent Ahmed Chah ; mais, lui, est venu dans un siècle de foi, et quand vient la foi la victoire suit. La foi s’en va, et revient ; elle est partie, elle reviendra, et avec elle reviendra la puissance afghane. Les Mogols sont venus, ont levé l’impôt et sont partis, les Afghans