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LETTRES SUR L’INDE

satisfaction visible ; « mais pour tout cela il faut payer, et les roupies s’en vont : ce n’était pas comme cela autrefois. » J’essaye de lui faire comprendre qu’il ne peut guère en être autrement ; que des lunettes ne peuvent venir sur un nez d’homme sans qu’un certain nombre de roupies sortent de sa poche et que cela serait contraire aux lois les mieux établies de l’économie politique ; qu’il est impossible, d’autre part, que le gouvernement se charge de fournir de lunettes, aux frais des contribuables, tous les nez de mollahs, car ce serait tomber dans les errements funestes, vingt fois condamnés, du socialisme d’Etat. Il me répond d’un air ennuyé : « Oui, vous avez raison. » Mais je vois bien que c’est pour se débarrasser poliment de moi, et que mes arguments orthodoxes n’ont pas ébranlé sa conviction.

« Les Engriz[1] sont justes, il n’y a pas à dire le contraire : ils font respecter la vie et la propriété du faible comme du fort, et il n’y a plus de guerre entre les tribus et les villages. Cela n’empêche pas que l’on était aussi en sûreté et peut-être mieux, au temps ancien. La preuve, c’est qu’il a fallu établir une police de

  1. Les Anglais.