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IX. — PHILOSOPHIE AFGHANE

Pir est appelé à toutes les deux lignes impie, menteur, misérable, damné, porc maudit, etc. C’est, comme on voit, un livre éloquent et fortement raisonné ; aussi est-il resté classique et a-t-il donné le ton de la littérature sérieuse des Afghans : c’est un texte de langue, qu’il importe fort d’étudier, si l’on vise à un style relevé.

Mais le Maître de Lumière ou de Ténèbres, comme vous voudrez, fit école ; il eut bientôt toute une armée autour de lui, et les Rochaniens tinrent pendant un siècle contre les armées du Grand Mogol : ils furent extirpés à la fin. On prétend qu’il en reste quelques centaines parmi les Afridis de la vallée de Tira, et qu’il y’a un exemplaire des ouvrages du Pir Rochan dans les mains d’un de ses descendants. Le commissaire de Péchawer, Edwards, était arrivé à se procurer un de ces ouvrages ; il se l’était fait traduire en hindoustani par Séid Omar, et devait lui-même le publier en anglais ; mais le manuscrit a disparu dans la bagarre de la grande rébellion ; Edwards est mort, et le Maître des Ténèbres est rentré dans sa nuit. Séid Omar, qui a lu cinq autres ouvrages du Ténébreux, me déclare qu’il ny a rien trouvé qui ne respire la morale la plus pure ; je lui ai demandé ce qu’il y avait dedans : malheureusement il ne se rappelle pas bien. Mais il l’admire beaucoup, malgré les ana-