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LETTRES SUR L’INDE

trois tumulus, débris du bouddhisme. Le pauvre Lœwenthal fit là jadis des fouilles heureuses, y découvrit des idoles bouddhiques et de ces monnaies indo-grecques et indo-scythiques que les fidèles aimaient à entasser dans les stoupas. Toutes les fois qu’il y a averse aux environs de Péchawer, le bazar est le lendemain inondé de ces monnaies d’argent et de cuivre vieilles de vingt siècles, auxquelles les marchands mêlent innocemment de belles monnaies d’or au coin des mêmes rois, qui datent de la seconde moitié du dix-neuvième siècle.

Au pied d’un de ces tumulus, un fakir s’est creusé une sorte de tombe à demi couverte, où dormir plus au frais, maintenant et plus tard. Il répète d’autres formules que le bhikchou des temps jadis : la vue d’un bout[1] le mettra hors de lui et le plus beau Bouddha du monde ne lui passera pas entre les mains sans y laisser au moins le nez et les oreilles ; et pourtant, je crois qu’en dépit de tout le Maître l’eût volontiers reconnu pour sien, Car ils ont compris la vie de la même façon : mendier, prier, rêver, dormir. Quelque fidèle charitable a planté pour le fakir, auprès de sa tombe, deux figuiers,

  1. Bhikchou, mendiant bouddhiste ; bout, idole (corruption du mot Bouddha).