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LETTRES SUR L’INDE

et nous partons, le Pir, le Parsi et moi, escortés de huit alguazils.

Nous arrivons au fameux talab : c’est un bassin carré dont on ne voit pas le fond, que hérisse une splendide moisson de blé : au milieu s’élève une plateforme carrée. — « Djezailchi, qu’est-ce que c’est que ce talab ? — C’est le talab de Djemchid, Sâb. — Qu’est-ce que c’était que Djemchid ? — C’était un roi, Sâb. — Quand vivait-il ? — Je ne sais pas, Sâb. Mais voici le sifid rich du village, Nik Mohammed, qui est un grand savant. » Je m’approche du sifid rich[1], qui m’apprend que le talab a été creusé exactement cinq siècles avant Mahomet ; la chose est certaine, car on a trouvé au fond un couteau de fer qui portait une inscription de Djemchid, ainsi conçue : « Ce talab a été creusé par moi, Djemchid, cinq cents ans avant l’Hégire. » J’admire cette version imprévue du fameux « nous autres hommes du moyen âge. » « Vous avez vu vous-même ce couteau ? — Oui, Sâb. — Où est-il ? — Chez Sékelgar qui l’a découvert. — Où demeure Sékelgar ? — Il demeurait à Péchawer, mais à présent il est mort. — Qu’est devenu le couteau ? — Dieu le sait. »

  1. Sifid rich, barbe blanche, le Nestor du village.