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VIII. — LA COUPE DE DJEMCHID

conditions de ces douaniers sans mandat et de se racheter du pillage en espèces sonnantes.

Aussi l’Afridi était-il l’ogre du pays. Si vous demandez à un Péchawéri pourquoi on appelle ces gens à Afridis, il vous répondra sans hésitation : parce que ce sont des Afrith, des démons. Il y a bien une autre version sur l’origine du nom : la première fois qu’on amena des spécimens de la race à la cour mogole, l’empereur, qui était Akbar, frappé de leur apparence sauvage, demanda quels animaux c’étaient là, et son ministre, philosophe indulgent, répondit : « Ham afrida and, c’est-à-dire : ce sont, après tout, des créatures du bon Dieu. » Le populaire n’est point de l’avis du philosophe, quoiqu’au fond, à y regarder de près, les deux formules reviennent bien au même.

Ces pillards de marchands sont à l’occasion une puissance : c’est quand l’invasion souffle à droite ou à gauche de la passe. L’ouragan ne passera pas sans leur permission : ils tiennent la clef de l’outre aux tempêtes. Le jour où la Société des amis de la paix voudra empêcher sérieusement un conflit entre la Russie et l’Angleterre, elle n’aura qu’une chose à faire : envoyer à la djirga afridie une djirga composée de ses membres les plus éloquents et négocier, argent comptant, la neutralisation de la passe. Nadir