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LETTRES SUR L’INDE

I

Les Apridis, — car tel est leur vrai nom, Afridi est la prononciation persane,  — les Apridis sont des gens bien logés ; ils occupent la passe de Khaiber et le pays des alentours ; or, comme Khaiber est le passage nécessaire des caravanes se rendant de Caboul dans l’Inde, ils sont admirablement placés pour vivre aux dépens d’autrui. Il y a un proverbe afghan d’une noblesse stoique : « Si tu as, mange ; si tu n’as pas, meurs. » Je ne sais s’il y a beaucoup d’Afghans qui suivent la maxime ; ce ne sont pas en tout cas les Afridis : « Si tu n’as pas, prends ». Et il y a double plaisir à prendre, quand on prend sur des Persans, des Caboulis, des Parsivans, des Boukhariotes, et autres créatures de ce genre, dont pas mal, d’ailleurs, sont hérétiques. Les caravanes, il est vrai, sont armées ; mais l’Afridi est chez lui et vise d’en haut : aussi le plus sage, en général, était-il encore d’en passer par les