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LETTRES SUR L’INDE

Bengale musulman, et les immenses ramifications d’un gouvernement occulte qui, par un système admirablement organisé de missions, d’impôts et de caravansérails espacés sur toute l’étendue de l’Inde du Nord, envoyait régulièrement et en toute sécurité, de Calcutta à la frontière afghane, des fonds, des hommes et des armes.

La découverte de cette conspiration, qui durait déja près d’un demi-siècle, est tout un roman. Ce n’est point à l’administration anglaise qu’en revient l’honneur, car elle fit tout ce qu’elle put pour ne rien voir. Dans la campagne de 1858, on avait avec étonnement remarqué parmi les morts des hommes qui avaient, à ne pouvoir s’y méprendre, le type bengali : petite taille, teint basané, barbe rare. Cinq ans plus tard, un agent de police pendjabi, nommé Guzan Khan, qui avait fait la campagne d’Ambéla, rencontre sur la grande route quatre voyageurs dont le type lui rappelle les morts de 58. Il entre en conversation avec eux, les fait parler, apprend qu’ils viennent du camp de Malka et qu’ils se rendent à Patna pour chercher des fonds et des hommes. Il les arrête, malgré leurs supplications, leurs appels à leur foi commune de Musulmans, leurs offres d’or et d’argent, et les traîne devant le magistrat de Karnal : celui-ci, qui connaît