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LETTRES SUR L’INDE

doustanis : cela dispensait d’attaquer de front le massif inabordable de Sitana ; par malheur, la passe appartient à des tribus neutres. Le général anglais, Chamberlain, ne les avait pas averties de ses intentions, pour ne pas donner l’éveil aux Hindoustanis : il comptait arriver en un jour ou deux à Sitana, la détruire et, la chose faite, rentrer aussitôt en territoire britannique. Les neutres ne le prirent pas ainsi : voyant venir 7,000 hommes avec 4,000 mules de bagages, ils prirent peur, se dirent qu’on leur en voulait, et barrèrent la route. Chamberlain dut s’arrêter : quatre jours plus tard, les 12,000 fusils de Bouner prenaient parti ; bientôt le Sahib de Svat lui-même, le pacifique fakir, débordé par l’opinion des tribus et par les reproches de sa conscience, déclarait la guerre sainte. On vit accourir deux mois durant, à côté des Svatis, des Gadouns et des Bounervals, des bandes innombrables de toutes les tribus qui s’étendent jusqu’aux confins du Yaghistan de Caboul, Houssainzais, Akazais, Amazais, Ranizais, Tchigazais, les Madakheil, les Khudakheil, les Bajaours, et d’autres dont on n’avait jamais entendu le nom ; aux derniers jours arrivait le clan lointain de Dher, avec son chef Ghazan Khan. Ce qui ne devait être qu’une razzia contre une bande de 2,000 hommes devenait une guerre de races ;