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V. — LES AFGHANS DU YAGHISTAN

riche veut recevoir en prince : ils s’endettent et deviennent la proie des préteurs hindous pour échapper à l’épithète de choum, ladre, la pire qui puisse s’adresser à un Afghan, surtout à un Afghan de haute volée. Le vieil Afzal Khan, le descendant de la famille royale des Khatak, est universellement méprisé, non pour ses crimes et ses trahisons, mais parce que c’est un ladre, parce qu’aussitôt qu’il voit de loin paraître un hôte, au lieu de le recevoir tout d’abord, il lui demande : « D’où viens-tu ? » l’assassine de questions de pied en cap et « ouvre la bouche comme un puits vide[1]. »

Telles sont les trois vertus cardinales de l’Afghan, tel est le Code du Pouchtoun, le Pouchtounvalai. On voit que dans cette liste ne paraît pas rastiya, la loyauté. Un serment, un traité n’engagent qu’autant qu’on a intérêt à les tenir. Dans la lutte de la vie, la parole n’est qu’une arme et la promesse n’est qu’un filet de chasse comme un autre. La Djirga des Khédou Kheil avait oublié la terrible maxime de leur nation : « C’est quand tu t’es réconcilié avec ton ennemi que tu dois te défier de lui. »

  1. Chanson de Mahmoud. Voir la treizième lettre.