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IV. — LES GHILZAIS

Les roses rouges sont le sang des martyrs :
Viens, petit…

Les doubles roupies[1] volent de toute part :
Viens, petit…

Hérat appartient à Téhéran :
Viens, petit…

Ayoub Khan ne sait plus que faire :
Viens, petit, attrape les pruneaux[2] !

Si Ayoub Khan prend résolument l’offensive, avec l’appui ouvert ou latent de la Perse, c’est-à-dire de la Russie, l’Émir, abandonné à lui-même, pésera peu dans la balance. Il a semé autour de lui trop de haines, et le moment de la récolte amère pourrait être venu. Il a contre lui, outre les Ghilzais, tous les patriotes, tous les Ghazis de la guerre sainte, dont il a trahi les espérances et scandalisé la conscience, par la proscription des patriotes les plus illustres et par ses compromissions avec l’Anglais. Il a beau faire le fier au durbar, se poser en neutre entre le Russe et l’Anglais, presque en arbitre, déclarer à ses sujets qu’il n’est ni russe ni anglais, et qu’il empêchera le Russe de passer dans l’Inde, l’Anglais de passer en Turkestan ; les faits parlent plus haut que les paroles et disent que, s’il n’est

  1. Les roupies anglaises.
  2. Gazette de Lahore, le 15 avril 1880.