ceux qui donnèrent à cette formule sa forme définitive, nous avons le droit de dire que le rapprochement qui en fait le fond remonte à une époque où la valeur primitive des deux dieux était encore sentie.
§ 33. Mais ce n’est point seulement dans les parties dites anciennes de l’Avesta que paraît le caractère primitif de Haurvatât et d’Ameretât. Il perce jusque dans les parties certainement récentes, dans celle où l’on sent le mieux le travail de révision, de coordination qui a donné au Mazdéisme sa forme définitive et dernière, je veux dire dans les Sîrozali, c’est-à-dire dans ces calendriers où sont rangés hiérarchiquement, chacun avec sa formule, tous les dieux du Mazdéisme. Reprenons en effet les deux formules étudiées plus haut (§§ 19, 20).
1. Nous avons vu que dans la formule d’Ameretât l’on invoque les gras troupeaux, les riches pâturages, et le Gaokerena, puissant, créé par Mazda. Nous avons vu que les deux premiers termes se rapportent à Ameretât, considéré comme dieu des plantes ; le Gaokerena, avons-nous ajouté, lui est consacré, parce que le Gaokerena est le roi des plantes. Mais cette valeur du Gaokerena n’est qu’une valeur dérivée, il est le roi des plantes, parce qu’il est la plante qui donne l’immortalité, parce qu’il a été créé pour repousser la vieillesse (zarmân)S parce que celui qui en mange ne meurt pas 2, Dès lors, son lien avec Ameretât remonte non plus à la seconde période du dieu, mais à la période primitive ; ce n’est pas à Ameretât, dieu des plantes, qu’il est lié, c’est à Ameretât, dieu d’immortalité, et le rapprochement dans la même formule des riches pâturages et du Gaokerena suffirait àlui seul pour nous faire connaître les deux âges de la vie du dieu.
2. Passons à Haurvatât. Il était invoqué avec yâiryâo hushitôis, le bien-être de l’année, c’est-à-dire les biens qu’apporte l’année. Il paraît donc bien là comme dieu de l’abondance et sous sa forme dernière. Mais il n’y paraît tel, comme nous l’avons déjà remarqué plus haut (§19), que grâce au mot yâiryâo qui détermine hushiiois. Hushiti par lui-même signifie : le bien-être, il est le synonyme àe hu gy âiti, la bonne vie (cf. § 19). Or, d’autre part, hugyâiti équivaut à Haurvatât et le supplée dans ses combinaisons avec Ameretât ; il est dit, par exemple, que le démon en
1. Bundehesh, 19. 19. Zarmân est l’abstrait de Zârîc (§ 26).
2. Bundehesh, 42. 14 ; 59. 5.