essayait de s’expliquer leurs noms ? Ameretât restait protégé par la transparence réelle de son nom ; Haurvatât était trahi par la transparence menteuse du sien : puisque haurva signifie « tout » et que Haurvatât est le dieu de l’Abondance, il s’en suivait forcément pour les Parses que haurvatât est « ce qui produit tout. » Haurvatât a donc pour la tradition comme pour nous une valeur abstraite ; mais c’est une valeur qui dérive de ses attributs matériels, qui les suit au lieu de les précéder (cf. § 12) ; elle n’a rien de commun avec la valeur abstraite primitive que l’étymologie nous révèle, elle est postérieure à la transformation de Haurvatât en génie des eaux ; au lieu de nous reporter à la période première de son histoire, elle nous conduit à la dernière phase de son développement.
C’est à cette phase que conviennent les interprétations de Plutarque et de M. Spiegel. Pour Plutarque le cinquième Amshaspand est le dieu de la richesse Osb ; 7 :aoj :o’j. C’est à peu de cliose près le Gott der Fi’dle de M. Spiegel (cf. § 2). L’expression de M. Spiegel est plus précise que celle de Plutarque qui a le tort d’éveiller des images qui ne sont pas directement liées à l’idée de Haurvatât ; Haurvatât n’est point le dieu des écus ni des talents d’or, c’est le dieu des richesses naturelles, du bien-être matériel. Nous emploierons le mot Abondance pour marquer son caractère en ce moment de son histoire.
§ 17. Nous passons à l’étude des textes qui se rapportent à cette période.
Les Parses nous apprennent qu’autrefois chaque Amshaspand avait son yast particulier^^1. Celui d’Ameretâ^ est perdu, nous possédons encore celui de Haurvatât, mais dans un état de texte lamentable^^2. Une chose toutefois que l’on voit très-nettement malgré l’extrême corruption du morceau, c’est que Haurvatât n’en peut revendiquer que le titre et les trois premières lignes : le reste est absolument étranger. De cela il n’y a pas à s’étonner : nous savons que les dieux mazdéens ne sont pas, sur ce point, des
1. Anquetil, Zend-Avesta II, 143. Les Yast sont « des prières accompagnées d’une bénédiction efficace, en forme d’éloges qui présentent les principaux attributs des Esprits célestes, leurs rapports avec Ormuzd et avec ses productions. » (Anquetil, ibid. II, 699).
2. Éd. Westergaard, p. 155.