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par les terres accordées aux garde-frontières. Il n’en reste pas moins que Théodose le Grand se vit contraint de restituer intégralement l’institution des limitanei dans les régions orientales de l’empire, et il en fut de même pour ces gouvernements militaires qui furent rétablis dans les provinces orientales, notamment en Thrace et en Asie mineure par Justinien, sous la pression incessante de la menace de guerre.

Les dispositions partielles et transitoires de Théodose le Grand et de Justinien furent remplacées, dans l’organisation des thèmes au temps d’Héraclius, par une militarisation générale et définitive qui se révéla dans la pratique par la création des thèmes d’Armeniakon et d’Anatolikon. L’organisation du thème d’Armeniakon trahit visiblement le caractère radical des réformes d’Héraclius : elles se distinguent très nettement des tendances hybrides et flottantes de Justinien qui, à leur tour, rappellent plutôt l’ancien système de Dioclétien. Tandis que Justinien avait partagé l’Arménie en quatre gouvernements pour n’introduire la militarisation du régime qu’en un seul et pour créer dans les autres, par une séparation fort malheureuse de l’administration militaire d’avec l’administration civile, une source d’éternelles frictions, Héraclius réunit toute l’Arménie en un seul thème, soumis à un gouverneur militaire (στρατηγός) et étendit le système des fiefs militaires réservés auparavant aux limitanei, sur l’ensemble de ce territoire. En introduisant ces réformes, il ne s’appuyait pas sur les traditions de l’empire romain et de l’armée impériale, mais plutôt sur les tribus indigènes depuis longtemps militarisées et sur les tribus belliqueuses venues du côté du nord : sous ce rapport il suffit de nommer les Lazes, les Abasgues, les Ibères, les Albans, les Huns et les Khazars. Il s’appuyait dans une certaine mesure aussi sur les traditions des anciennes satrapies arméniennes militairement bien organisées où, sous l’influence des Parthes ou des Sassanides, le système des fiefs militaires était connu depuis des siècles. Comme l’évolution ultérieure de l’organisation des thèmes le fait voir, toute cette administration d’allure féodale viendra de l’Orient et l’on ne la pourra implanter d’une manière durable que dans les pays dont la population, de par ses origines et ses traditions, y était déjà préparée. Pour maintenir le système des limitanei en Thrace et en Macédoine, Constantin Copronyme devra y faire