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LE VOLEUR

dis-je à Issacar dès que le garçon nous a munis de pernicieux breuvages.

— Pour un fort honnête homme, gros industriel, fabricant de produits chimiques, qui brûle du désir de faire votre connaissance et de vous voir placer deux cent mille francs pour le moins dans ses mains sans tache.

— Quelle singulière idée vous avez de me mettre en rapports avec des gens…

— Chut ! Chut !

Issacar se retourne pour faire signe à l’honnête industriel qui vient d’entrer et dont il a reconnu la silhouette dans une glace. L’honnête industriel a aperçu le signal. Il s’avance en souriant ; le ventre trop gros, les membres trop courts, une tête d’Espagnol de contrebande avec des moustaches à la Velasquez, le front déprimé, ridé comme par l’habitude du casque, les doigts épais, courts, cruels, écartés comme pour l’égouttement de l’eau bénite. Issacar fait les présentations comme s’il n’avait fait autre chose de sa vie ; et la chaise libre perd sa liberté.

— Monsieur, me dit l’honnête industriel, j’ai appris par M. Issacar combien vous êtes désireux de trouver, en même temps qu’un moyen d’utiliser vos merveilleuses facultés d’ingénieur et d’inventeur, un placement rémunérateur pour vos capitaux. Je pense que je puis vous offrir, pour une fois, cette double possibilité, savez-vous. C’est aussi l’avis de notre honorable ami M. Issacar, et je suis heureux qu’il ait ménagé cette entrevue, pour une fois, afin que je puisse vous exposer l’état de mes affaires, savez-vous. Si vous le permettez, je vais, sans autre préambule, vous donner une idée de mon entreprise.

Je permets tout ce qu’on veut ; et l’honnête industriel commence ses explications. Il parle le plus vite qu’il peut et j’écoute le moins possible. Mon Dieu ! Mon Dieu ! pourvu que ça ne dure pas trop longtemps !… À l’expiration du premier quart d’heure, le jeune homme blond, à côté de moi, commence à