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LE VOLEUR

se contentent pas toujours des réponses qu’on veut leur faire. Je préférerais, si c’était possible, ne point donner à la Justice l’occasion de contempler mon visage et, peut-être, de mettre le nez dans mes affaires. Quitter Paris sans rien dire ? C’est dangereux, car ça paraîtrait peu naturel. Alors ?…

Je trouve un moyen. Je m’en vais d’un pas léger chez Marguerite de Vaucouleurs, car je sais que Margot a repris pied dans la politique et que Courbassol, rappelé la semaine dernière au ministère, n’a de nouveau rien à lui refuser. J’explique les choses à Margot ; je lui fais sentir quel noir chagrin j’éprouverais à me voir obligé de parler, en Cour d’assises, soit contre une femme que j’ai respectée jusqu’au dernier moment, soit contre un homme que je continue à estimer. Mon langage est pathétique, car, si je ne suis pas sentimental, je sais faire du sentiment quand il le faut, et même très bien. Margot m’écoute en pleurant ; et, lorsque je lui ai expliqué ce que j’attends d’elle, elle me promet de s’occuper de mon affaire dès la nuit prochaine. Là-dessus, je rentre chez moi tout guilleret.

Le lendemain, je reçois un billet de Margot qui m’annonce que les choses vont pour le mieux. Le surlendemain, un garde à cheval m’apporte une lettre qui me demande au ministère. Je pénètre dans ce monument à l’heure indiquée, j’ai une conversation de vingt minutes avec un monsieur qui me complimente fort sur mes articles à la « Revue » de Montareuil, et m’annonce que je suis chargé d’une mission par le gouvernement. On a passé, en ma faveur, sur certaines formalités. Je dois aller inspecter et étudier les établissements pénitentiaires de la Dalmatie, faire un rapport ; et je reçois pour ma peine une somme de dix mille francs. Ce n’est pas énorme ; mais ça vaut mieux que rien.

Le gouvernement m’ayant confié une mission aussi importante, je suis obligé de partir immédiatement. J’envoie donc au juge d’instruction, dont je trouve chez moi une lettre de convocation à son cabinet, ma