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LE VOLEUR

À l’âge qu’a votre enfant, cette maladie est presque toujours fatale ; la mort survient rapidement au milieu d’une convulsion. Oui, à moins d’un miracle…

— Dites-moi franchement, docteur : votre science est-elle capable d’effectuer ce miracle ?

— Non, en vérité. Au moins, personnellement, je dois vous répondre : non… Mais j’ai des confrères, de grands confrères, dont l’expérience, ou la réputation si vous voulez, dépasse la mienne de cent coudées ; peut-être vous tiendraient-ils un langage autre que le mien. Essayez-en… Le docteur Scoundrel par exemple. C’est la plus haute autorité…

— Et, dis-je en hésitant — car une pensée fâcheuse se présente à moi comme je pose sur la table le prix de la visite — savez-vous quelle somme le docteur Scoundrel exigerait pour venir…

— Oh ! répond le médecin en souriant, il ne se dérange jamais à moins de cinquante livres payées comptant. C’est une célébrité, voyez-vous…

— Cinquante livres sterling ?

— Oui ; et aujourd’hui, dimanche, veille de Noël, il en demanderait peut-être soixante… quatre-vingts… cent.

Le docteur sort et Charlotte, immédiatement, entre dans le salon.

— Eh ! bien ? demande-t-elle d’une voix qui trahit son anxiété. Qu’a-t-il dit ? Est-ce la méningite ?

— Il ne sait pas ; n’est pas sûr… C’est très difficile de se faire une certitude. Il m’a conseillé de consulter un de ses confrères, un spécialiste renommé…

— Il faut l’envoyer chercher tout de suite, dit Charlotte.

— Oui, mais…

— Mais quoi ? Dis ! Quoi ?

— Ce spécialiste veut être payé d’avance… une grosse somme ; et je n’ai pas d’argent.

— Tu n’as pas d’argent ! s’écrie Charlotte.

— Non, je n’en ai pas ici. Tout ce que je possède est à la banque et je n’ai pas vingt livres à la maison.